Polyamoureux : mais concrètement, vous faites comment ?

Après le « ah ben moi, je pourrais pas ! », c’est généralement la deuxième réaction des moldus quand on parle de polyamour. Et comme souvent, ma réponse se résume à observer ce que les gens font déjà pour organiser leurs vies quand il ne s’agit pas d’histoires de cul — à tant se focaliser sur la question du sexe, on oublie qu’on sait déjà tous gérer plusieurs relations, en fait.

Pencil drawing - one girl kissing another girl on the cheek

Même quand on est super amoureux-se (ref. photo (c) darkmatterzone sur deviantart.com)

En fait, vous savez déjà

Même quand on est en couple super exclusif, super monogame, super amoureux, super fusionnel, on ne passe pas 24 heures par jour dans une bulle à se regarder dans les yeux. On interagit déjà socialement avec un grand nombre d’autres personnes, sans
toujours rendre des comptes minutieux à sa moitié, ni en temps réel, ni en différé.

On ne détaille pas les discussions avec les collègues, les partenaires de sport, les copains/copines. On raconte pas toujours ce à quoi pendant l’absence on a pu penser ou ressentir qui ne concernait pas l’autre. Et surtout on ne rend généralement pas non plus compte à notre chéri(e) de ce qui se passe dans l’intimité de notre entrejambe quand on est séparé :

  • ni quand ni comment ni combien de fois on est allé-e aux toilettes
  • ni quand ni comment ni combien de fois on s’est lavé-e
  • ni quand ni comment ni combien de fois on s’est caressé-e

- Tu me manques, tu fais quoi là ?

- Là j’essaie de faire caca.

Donc à moins de se focaliser sur la question du sexe, il n’y a pas de différence fondamentale entre une mission de trois jours dans la filiale britannique et une virée à Londres avec un amant (à part la prise en charge des frais, et à part si on oublie de donner des nouvelles) : vu de l’extérieur, c’est pareil.

De même, vu de l’extérieur, que ton Jules rentre d’une rencontre de basket ou d’un cinq à sept avec une chérie, c’est assez similaire : il est heureux, fraîchement douché et un peu fatigué.

Et de la même manière, quand ta nana a une super copine d’enfance en Corrèze chez qui elle passe un week-end par mois, ou bien quand ton mec remonte régulièrement à Chicoutimi voir sa vieille mère, vu d’ici c’est un peu pareil que s’ils avaient une aventure extra-conjugale : de l’extérieur on n’est pas sensé savoir ce qui se passe dans leur caleçon pendant leur absence.

Donc comment on fait ?

Donc pour savoir comment on peut s’arranger matériellement pour les allées et venues de l’un ou de l’autre, pour organiser les absences du soir ou du week-end, pour savoir s’il est opportun d’appeler toutes les heures ou si ça craint d’envoyer plein de sms, il suffit de se demander comment on se serait comporté dans une circonstance similaire s’il n’y avait pas été question de sexe.

Quelques exemples :

  • Ma femme m’annonce après le dîner que je devrai dormir seul cette nuit. Ce n’était pas prévu et sur le coup, ça fait bizarre. Mais si c’était sa sœur qui faisait un méga coup de blues et qui avait besoin d’elle, ça serait un peu pareil : elle partirait sans préavis. Au moins là, elle s’amuse.

  • Tu habites avec une copine mais tu passes régulièrement des nuits chez une autre amoureuse. La situation analogue dans le monde de la monogamie serait que tu aurais une colocataire et une amoureuse — et on supposerait en général que tu ne couches pas avec ta colocataire (mais pour déconner, on demanderait souvent à ton amoureuse si elle n’est pas jalouse). La question du sexe complique la gestion des émotions et de la jalousie mais d’un pur point de vue pratique, ça ne change rien.

  • Vous êtes mariés depuis quinze ans. Et puis Madame a une amante régulière et Monsieur aussi (mais pas la même). Et comme tout le monde s’entend hyper bien, on décide un jour de simplifier toutes les histoires de trajet en habitant tous ensemble. Mais comment on fait avec les enfants des uns et des autres et qu’est-ce qu’on leur dit ? Moi je dis : « comment vous auriez fait si ça avait été une cohabitation entre ami-e-s ? » En plus, les jeunes enfants s’en fichent royalement de savoir qui couche avec qui. Pour les moins jeunes, il faudra les mettre au jus, mais pour les questions purement matérielles, je suis persuadé que c’est pas plus compliqué que la gestion et les plannings des familles recomposées.

Y compris pour dire non

Accessoirement, nos repères de la « vie civile » nous aident aussi pour détecter si l’un des partenaires polyamoureux commence à trop tirer sur la corde. Ce n’est pas parce qu’on est polyamoureux ou qu’on s’est ouvert à l’idée du couple libre qu’on doit toujours tout accepter (en plus de devoir gérer sa jalousie). Et donc si l’autre se comporte d’une manière qui nous aurait fait tiquer même dans une circonstance « hors-sexe », c’est qu’il-elle abuse et qu’on peut bien le lui faire remarquer.

Un exemple concret et qui me parle, c’est le mari qui en partant le matin laisse entendre qu’il rentrera tôt, et qui se pointe comme une fleur à 3 heures du matin sans avoir répondu à aucun sms. Qu’il ait été au bar avec ses potes ou au lit avec une belle n’y change rien : sa femme mérite au moins autant de respect qu’un colocataire qui aimerait savoir s’il faut continuer à l’attendre pour dîner.

Et donc de même qu’on a le droit de râler qu’avec ton boulot tu es toujours par monts et par vaux, que le foot te prend trop de temps ou que tes sœurs pourraient aussi visiter Mamie de temps en temps pour qu’on ait plus de week-ends à nous, de même on a le droit de râler quand les arrangements du couple libre ne nous vont plus. Non seulement on a le droit mais même il faut râler, au moins pour mettre la question sur la table. Râler non pas quand l’amant prend trop de place, mais quand on ressent qu’il ne nous en reste pas assez ; quand l’attention portée au projet commun semble flancher ; quand on se sent délaissé-e, quelle que soit la cause extérieure.

Bon donc, concrètement, moi

Après les exemples théoriques, je peux finir par quelques exemples concrets de comment nous faisions en ce qui me concerne (quand j’avais encore une femme et une chérie).

J’avais depuis presque dix ans un rythme de travail qui me faisait m’absenter chaque semaine une ou plusieurs nuits pour le boulot. Donc quand j’ai eu des amantes puis quand je dormais deux nuits par semaine chez ma chérie, ça n’a matériellement rien changé. Dans ce sens là, c’est super facile, puisque la solution ‘platonique’ pré-existait déjà dans les faits.

J’ai déjà écrit un peu partout que ma femme sort seule bien plus souvent que moi. Donc les soirées de baby-sitting papa-poule, je connais. Elle ne me tenait déjà pas tellement au courant de ce qu’elle faisait dans ses soirées avant qu’elle ait officiellement un amant, donc ça n’a pas changé grand-chose non plus.

Et pour les escapades en amoureux avec ma chérie, on a refait comme quand j’avais eu des week-ends avec des copains ou des stages. Et pour les enfants, je leur ai donné des tonnes de détails sur là où j’allais — j’ai trouvé que ça compensait bien l’absence de détails concernant la personne avec qui j’y allais.

Et vous, vous faites comment ?

31 réponses à “Polyamoureux : mais concrètement, vous faites comment ?

  1. Bonjour,
    C’est la première fois que je me lance dans un commentaire, même si comme souvent tes articles font échos en moi…
    Alors voilà, je me sens polyamoureuse depuis pas mal de temps déjà, mais toujours monogame, car je n’arrive pas à concevoir comment tout concilier, les bras de l’un et de l’autre, et les plannings. Alors, au lieu de gérer de la jalousie, chez moi, on gère de la frustration!
    Comme toi, mon conjoint s’absente pour le travail plusiseurs soirs ou nuits par semaine (2 à 4 en général). Si je devais passer 2 soirs avec mon crémier, je trouve que si, ça changerait beaucoup de choses. Comment être un couple avec au mieux 3 soirées ensemble dans la semaine… On supporte l’absence parce qu’on a pas trop le choix, mais « se l’imposer » volontairement? Et pour les enfants, j’ai déjà parfois l’impression qu’ils vivent dans une famille recomposée dont les parents s’aiment et vivent encore ensemble…
    Enfin bref, je ne désespère pas de trouver l’équilibre qui nous conviendra à tous…

    • Je ne comprends pas le morceau à propos de ‘se l’imposer volontairement’. Si ton homme n’est pas esclave, le fait qu’il ait un travail qui l’amène à être souvent absent est un choix parfaitement volontaire et qui a des conséquences importantes sur la vie de votre couple. Pourquoi les choix qu’on fait pour l’argent seraient ils plus indiscutables que ceux qu’on fait pour l’amour ou le plaisir ?

      Par ailleurs, je suis convaincu d’un truc : les absences répétées, pour peu qu’elles soient bien vécues, contribuent souvent à la longévité d’un couple. Et à l’inverse, la cohabitation permanente, bien qu’elle soit ardemment souhaitée par les amoureux, est délétère. Je m’en expliquerai dans un prochain article.

      • Tout à fait d’accord avec toi Audren, s’il n’y a pas d' »absences » il n’y a pas non plus de retrouvailles et on tombe vite dans le couple zombie à force de tout le temps être collés. Il n’y a plus de déséquilibre désir/frustration/plaisir qui font le piment voir juste la vie d’un couple.

      • Tu es agaçant à avoir toujours le dernier mot Audren … Mais en fait, tu as tellement raison que c’est juste magnifique.

      • C’est vrai que ça doit être agaçant (et en plus je me rends compte que j’ai cette tendance). Il faut que je fasse plus attention.

      • Entièrement d’accord !
        Je constate aujourd’hui (trop tard?) que cette fusion que nous avons eu avec mon crémier (c’est sympa comme expression, ça fait moins highschool que boyfriend ;p) dès les premiers jours est probablement la cause du mal-être / vide que je ressens au sein de mon couple. Et qui me font remettre en question le sens que je voudrais donner à la vie de couple.

        Toujours collés ensemble, jamais de dispute, toujours d’accord sur tout…saupoudrés de « Naaaaan c’est toi qui raccroche le premieeeer ! »….je peux dire que depuis un certains temps (qui devient de plus en plus long et pesant) cet idéal de couple si ardemment souhaité par beaucoup s’est pris une claque dans la gueule monumentale. J’en suis arrivé à me réjouir quand il m’annonce qu’il est bloqué sur le périph’ et qu’il sera pas rentré de sitôt.
        Tout ceci me donne l’impression d’être tombé du haut d’une falaise et la chute est vertigineuse…Et je redoute plus que tout l’atterissage…
        Et du haut de mes 25 ans, j’ai déjà la sensation amère d’avoir laissé passer quelques années de ma vie.

        Bon je pense que c’est pas non plus forcément la seule et unique cause. Sans raconter toute l’histoire de mon couple (bonjour le pavé sinon ;p) mais entre les aléas de la vie et les caractères de chacun, cette fusion exacerbée fait pencher la balance du mauvais côté.
        Evidemment ce sujet mérite plus de réflexions. Sans m’imposer à toi comme le messie, je peux, si tu le souhaites te faire part de mon témoignage à ce sujet. Peut-être cela t’aidera -t-il dans l’élaboration de ton billet sur le sujet. Billet que j’ai hâte de lire forcément ! 🙂

      • Avec plaisir !
        (petite note de vocabulaire : j’utilise ici le terme crémier/crémière surtout pour désigner un amant/une amante occasionnel-le, par extrapolation sémantique capillotractée de l’expression « le beurre et l’argent du beurre » 😉 mais chacun peut bien l’utiliser pour désigner qui il veut, y compris une vendeuse de produit laitiers.

  2. Je suis d’accord qu’être tout le temps ensemble est une mauvaise idée pour un couple. Et je suis également d’accord que les absences pour le plaisir sont au moins aussi valables que celles pour le boulot sur le principe. Mais j’ai déjà l’impression de ne pas avoir assez de temps de qualité pour le couple. La présence de l’amant devrait encore faire baisser le ratio, ou se contenter lui-même de pas grand-chose. Dans tout les cas, l’une des relations est à mon sens forcément maltraitée… J’ai l’impression que l’équation est quasi impossible quand on a des enfants et/ou des horaires professionnels différents. Et il n’est pas toujours facile de trouver un travail satisfaisant qui s’adapte à nos choix de vie.

    • « pas toujours facile de trouver un travail satisfaisant qui s’adapte à nos choix de vie » — effectivement, tu mets le doigt où ça fait mal.

      Par ailleurs, tu as raison que le temps n’est pas extensible : on ne peut pas avoir en même temps un projet passionnant de carrière, un projet de couple sur le long terme avec de jeunes enfants, une maison à construire, un groupe d’amis soudés, et en plus entretenir d’autres relations amoureuses qui prendraient plusieurs soirs par semaine. Ça n’empêche pas d’avoir un-e amant-e occasionnel-le (ou plusieurs), et on peut bien construire une relation de qualité même avec des contacts très sporadiques (j’ai de très bons amis que je ne vois qu’une ou deux fois par an) mais effectivement, ça ne permet pas –à moins de cohabiter à trois– de vivre un schéma poly où l’on serait avec chaque partenaire autant de temps.

      • « on peut bien construire une relation de qualité même avec des contacts très sporadiques »
        Le hic est quand on découvre chez l’amant en question un être d’une compatibilité telle que choisir de ne pas vivre avec lui car on aime profondément son officiel devient parfois un vrai calvaire !!!

  3. J’ai expliqué à nos ados de 15 et 18 ans que leur mère avait besoin de souffler. Un boulot stressant y compris le samedi, courir tout le temps… Bref, quelle avait aussi bien le droit de sortir entre copine et rentrer tard, voire de temps en temps rester dormir après une soirée ou de ne pas être la de la journée. La grande pas dupe, préfère ça à des explications tout aussi interminables que pathétiques, la petite intègre et zappe. Du coup, elle est beaucoup plus présente pour nos filles quand elle est là et ce n’est pas plus mal.

  4. Concrètement je fais comment ? Bah je gère plus ou moins bien selon les jours la frustration de ne pouvoir accorder à mon « autre » que quelques minutes de temps en temps. C’est juste horrible cette frustration ! Je rêve de soirées, de nuits, de weeks end et ce rêve est utopique. Donc concrètement je ne sais pas comment je fais, ni comment je vais gérer çà sur le long terme. C’est parfois euphorique quand on a pu s’accorder un moment et douloureux quand çà n’est pas possible.

  5. J’ai une question sur le « concrètement, on fait comment? ».

    Dans la présentation du couple libre faite sur ce site, on a l’impression que l’un et l’autre partenaire ont tout à gagner à s’accorder la liberté (sexuelle, car c’est de cela dont on parle). C’est bien joli, mais je n’ai pas l’impression que ce soit toujours aussi équilibré.

    Les questions.
    1: il se passe quoi lorsqu’après 2-5 ans de couple libre, l’un des deux partenaires a utilisé sa liberté pour effectivement collectionner des expériences positives et l’autre se rend compte que draguer, ce n’est pas pour lui/elle? Il se passe quoi quand l’un des deux bénéficie d’une liberté toute théorique, mais ne trouve personne pour la partager?
    2: concrètement, quel pourcentage de couples libres, ont-il des relations équilibrées et dans quel pourcentage l’un des deux se retrouve-t-il sans pouvoir bénéficier de cette liberté, faute de pouvoir trouver un, une ou des partenaires externes? Cela concerne-t-il plus les hommes que les femmes?

    • 1 – il est important d’être libre même sans exercer sa liberté chaque jour. Et les arrangements équitables ne sont pas toujours égalitaires. Il suffit que chacun y trouve son compte. Et tout arrangement se renégocie (même le mariage, contrairement à ce que la culture nous laisse croire)

      2 – Oui, apparemment c’est plus facile pour les filles de trouver d’autres partenaires sans attaches que les hommes. Peut-être que ça changera.

  6. Merci pour le lien vers l’autre article qui répond mieux à la question posée. La réponse est donc que donner sa liberté à l’autre pour qu’elle (vous pensez que ce sont surtout des « elles ») en profite mais rester soi-même à se morfondre comme un raté est une recette pour le désastre. Je dirais: c’est enfoncer une porte ouverte que de le reconnaitre.

    Là où le raisonnement devient plus intéressant, c’est quand on cherche à pousser le raisonnement un peu plus loin. Si ce que vous supposez est vrai et que les femmes ont plus de choix, alors ce devrait être massivement les hommes qui s’opposent au couple libre. Or je n’ai pas l’impression que ce soit vrai: beaucoup de femmes s’opposent mordicus au couple libre. Pourquoi, si elles ont tout à gagner et rien à perdre dans l’échange? Même si elles n’ont pas d’intérêt à profiter elle-mêmes des à-côtés, donner l’autorisation à leur mec de draguer devrait être perçu comme quasi sans-risque si les mecs en couple n’ont aucun succès!

    • N’ont aucun succès tant qu’ils disent qu’ils ont une compagne qu’ils aiment et avec laquelle ils veulent rester. Ils ont beaucoup plus de succès s’ils laissent entendre qu’ils seront bientôt célibataires. Je ne pense pas que les femmes poussent le raisonnement aussi loin, mais la posture est cohérente.

  7. « N’ont aucun succès tant qu’ils disent qu’ils ont une compagne qu’ils aiment et avec laquelle ils veulent rester. Ils ont beaucoup plus de succès s’ils laissent entendre qu’ils seront bientôt célibataires. »

    Ca voudrait dire que les hommes divorcés ou pas encore en couple ont un succès fou. Je ne pense pas que ce soit vrai pour tous.

    Ca voudrait aussi dire que les femmes ne cherchent pas une relation éphèmère mais un mari. De là à dire qu’elles cherchent un soutien familial, il n’y y qu’un pas. Ca arrive, particulièrement en France, mais je ne suis pas convaincu que ce soit si souvent le cas que cela.

    Enfin, ça voudrait dire que les femmes en couple qui refusent que leur mec aille voir ailleurs pensent qu’il va mentir et se prétendre libre ou sur le point de l’être. Là encore je ne suis pas convaincu.

    En fait, je ne suis pas du tout convaincu par toute cette histoire:
    -qu’en est-il des femmes très laides, qui ne devraient pas trouver facilement de plan cul non plus?
    -qu’en est-il des jolies femmes qui ne trouvent personne pour une nuit (j’en connais)?
    -qu’en est-il de ces hommes célibataires qui ne trouvent personne non plus?
    -qu’en est-il de ces Don Juans invétérés qui trompent leur femme avec une nouvelle amante chaque semaine?

  8. Je reviens sur l’idée qu’il est plus facile aux femmes de trouver des partenaires. J’ai téléchargé quelques études sur le sujet (pas en libre accès, désolé), je ne pense pas que ce soit si vrai que cela. Je pense que la croyance est due au fait que les nerds sont majoritaires sur Internet et qu’ils n’ont pas de succès. S’ils avaient du succès, ils passeraient leurs soirées à autre chose que de se connecter au net…

    Ce que ces études montrent surtout, c’est qu’il y a entre 15 et 20% de la population des pays développés qui n’a pas accès au sexe (hommes et femmes) et que le pourcentage d’adultes qui a plusieurs partenaires en parallèle est très faible (de 1 à 2%). C’est très loin de l’image donnée par les médias genre « sex and the city ».

    Autre chose: le couple libre existe dans certaines cultures. Par exemple, les indiens Canela au Brésil ou les habitants des îles Trobiand. Une chose qui devrait vous amuser chez ces derniers: les tabous concernant la nourriture ont remplacé ceux concernant la sexualité. Sur les îles Trobriand, on ne mange pas en public.

    Curieusement, ces cultures ont reculé lorsqu’elles ont été confrontées au modèle monogame apporté par la colonisation. Il serait intéressant de savoir pourquoi. Ces peuples ne sont pas idiots, ils ont du trouver un avantage à abandonner leur relative liberté sexuelle pour un modèle plus exclusif.

    • Concernant « l’idée qu’il est plus facile aux femmes de trouver des partenaires » : attention, il vous manque un morceau. Les hommes et les femmes sont à jeu à peu près égal quand il s’agit de se trouver un-e partenaire de vie (c’est pour ça que meetic est payant des deux côtés). Mais quand il s’agit de trouver des partenaires pour du sexe sans attaches, je maintiens que c’est bien plus facile pour les femmes, à « attractivité égale », et je ne suis certainement pas le seul à le dire. Si vous ne me croyez pas, vous pouvez tenter la petite expérience suivante : créez deux profils bidon sur gleeden, un de femme, un d’homme, sans photo ni message personnel, juste quelques descriptifs d’âge et de couleur de cheveux. D’un côté vous aurez 10 demandes de tchat en cinq minutes et 50 messages dans la journée. De l’autre, rien (sauf peut-être du racolage et des arnaques). Pensez juste à supprimer vos profils après cette petite expérience.

      • Je dirais même plus quelque soit le site de rencontre le contact ne vien quasi jamais de la femme, et sans passer par des sites de rencontres, dans 95% des cas, la femme ne va pas aller aborder puisqu’elle va être sollicitée par ailleurs. En gros t’es un homme, si tu te bouges pas t’as rien et si tu es une femme tu n’as qu’à attendre et ça vient « tout seul ». C’est triste car tout le monde gagnerait à un peu d’équité dans l’expression du désir

  9. Il y a pas mal de biais dans votre « petite expérience », dont le fait que la population des sites de rencontres ne correspond pas du tout à la population générale. Enfin et surtout elle ne prouve qu’une chose: que les hommes sont plus nombreux à proposer du sexe que les femmes, pas qu’il est plus difficile pour eux de l’obtenir. Les participant(e)s à ces sites peuvent simplement reproduire des roles genrés (et c’est en fait le cas). En fait, si l’on creuse un peu plus, on s’aperçoit que les femmes qui recherchent vraiment sur ces sites ont des difficultés à vraiment trouver des partenaires. Les hommes proposent, mais mis au pied du mur ne viennent pas aux rendez-vous.

    Il faut aussi noter que la question était de l’accessibilité à un partenaire, sans autres conditions. Posée en ces termes, d’autres voies d’accès entrent dans le cadre de la question. Ainsi, il est très facile pour un homme pas très beau ni doué en séduction d’accèder à une partenaire s’il est d’accord pour la payer. Il y a toute une industrie pour, même si l’on parle de l’interdire en France. Il n’y a pas vraiment d’équivalent pour les femmes, donc une femme pas très belle ni douée en séduction ne va pas pouvoir simplement payer pour avoir un amant prêt à lui fournir les services qu’elle pourrait désirer (et qui ne sont pas nécessairement ceux que les amants volontaires à titre gracieux sont prêts à fournir).

    Juste histoire d’éviter les écueils de la discussion entre pros et anti-prostitution, notons que, pour les habitants des îles Trobiand dont j’ai parlé au dessus, il est normal que l’homme paye sa compagne (en stocks de nourriture, c’est une société sans argent). C’est d’ailleurs aussi un comportement fréquent chez d’autres primates, mais je digresse.

    Revenons sur le problème de l’accessibilité à un ou plusieurs partenaires. Posée en terme de simple accessibilité, elle peut être répondue en regardant le pourcentage d’hommes et de femmes disant être satisfaits. Ils ne sont pas différents et sont plutôt corrélés au niveau socio-professionnel (mais pas linéairement).

    Enfin, on peut aussi s’affranchir des biais entre hommes et femmes en étudiant les relations homosexuelles. Vos théories du couple ouvert sont largement appliquées par les hommes gays, par exemple. Mais chez les hommes gays, il y a des disparités énormes au niveau de la facilité à trouver des partenaires: certains les collectionnent, d’autres ont les plus grandes difficultés.

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  11. Je voudrais revenir sur le « comment on fait », même si cette discussion sur les opportunités de chacun est intéressante.

    *** Exprimer ses envies et ses possibles ***

    Dans ma vie, le tout a toujours été d’afficher d’emblée mon type de disponibilité affective et spatio-temporelle. « J’ai plusieurs relations », « mon fils qui a X ans », « le beau-père de mon fils », « mes sessions de boulot », « mon boulot me laisse pas mal de temps libre », « au moins six semaines à Berlin chaque été », ces indices émaillent ma conversation en amont de tout passage à l’étape couette.
    *
    Si la personne recherche « the one » et rien d’autre, on va en rester aux blagues sur les curés et se dire au revoir vers deux heures du mat’. Si la personne est intéressée par une nuit voire plus, on va commencer par une nuit.
    *
    Si on se revoit, je vais commencer par observer ce qu’iel me propose ou me demande, et réfléchir à ce que ça indique. Parallèlement j’essaye de bien comprendre ce je souhaite ou pas, et d’adapter mon propre comportement pour ne pas l’emmener sur une mauvaise piste (Comme une « lune de miel » sans la moindre réflexion, suivie d’un freinage brutal… Vous aimeriez qu’on vous fasse ça ?)
    *
    Puis je vais rapidement avoir envie de la fameuse discussion « esquissons nos accords pour une relation » ; qui souvent aura lieu sur quelques jours, à la fois par messages/mails et de vive voix. Je le fais un peu au feeling, par exemple une fois à peine embrassé j’ai glissé au jeune homme « tu sais que j’ai plusieurs relations ? » comme j’aurais demandé « t’as des capotes ? » (il m’a répondu avec un sourire que oui et on a repris où on en était).

    ***

    Une autre fois on a tellement communiqué sur ce qu’on vivait, ce qui était important ou souhaitable ou pas dans nos vies, que la forme de notre relation était d’emblée évidente. Au cours de ces trois semaines en amoureux on s’est fait part de nos plans de voyage respectifs, et à la fin on s’est juste dit « à un de ces jours ». La fois d’après aussi, mais peu à peu on s’est mis à rigoler de voir qu’à chaque fois, on avait tous les deux du mal à se séparer.
    *
    Au bout de quatre ans, on a passé six semaines ensemble dont deux chez moi, et là on a discuté des différentes options. On a choisi de continuer comme ça, avec une nouvelle règle explicite, « pas plus d’un quart du temps ensemble » et une implicite, à savoir qu’on ne reste plus six mois sans se donner de nouvelles.

    *** Respecter les relations déjà existantes, renégocier ***

    Mon ex est resté poly-mais-mono pendant des années, tandis que j’avais tout le temps trois relations ou plus. Un jour il a rencontré quelqu’un. J’étais super content’ pour lui ! Je leur ai laissé plein d’espace pour vivre cette période full-mamours des débuts. Mais ensuite, entre son boulot, les soirées jeux de rôle et sa nouvelle copine, il s’est mis à être une denrée rare. Je l’ai très mal vécu.
    *
    J’ai essayé la patience, j’ai essayé le dialogue, j’ai réclamé, un peu, mais sans dépasser la règle du « pas motivé, pas la peine ». J’ai souffert, j’ai cherché ce que je pouvais faire. Rien. C’était à lui de faire quelque chose, de s’intéresser à notre relation, et il n’en avait pas envie. Ça s’est fini un peu moche, avec regrets, rancune, tristesse, et soulagement.

    ***

    Du coup je sais exactement ce que je ne veux PAS faire à quelqu’un. Quand je me vois en train de ne pas appeler, puis de ne pas rappeler, je me dis qu’il est temps de réfléchir (en amitié aussi, du coup). Je me demande ce dont j’ai envie, ce dont je n’ai plus envie. Je communique, je lui dis où j’en suis et ce qui est possible, sans brutalité inutile mais sans ambigüité.
    *
    Pour l’instant c’est arrivé surtout avec une personne. On s’est aperçu qu’on a des périodes « intenses » et des périodes « lâches », mais que ça nous convient. On est arrivés à ne pas avoir d’attentes ou d’exigences. Chacun freine ou accélère le rythme, l’autre suit. On ne se pose pas de lapins, on sait se dire « mardi soir, peut-être » puis se redire oui ou non le mardi aprem.
    *
    J’ai aussi posé que je ne voulais plus entendre parler de certains de ses problèmes, car je ne peux pas m’empêcher de vouloir l’aider alors que lui-même ne veut pas s’aider. De son côté, il a tacitement choisi de ne pas s’investir de façon parentale envers mon fils, ce qui était une option mais pas une attente.

    *** Apprendre à gérer son lit ***

    Une fois à la fin d’une soirée, ils étaient là tous les trois. J’ai pas géré. Javais envie de leur dire « Bon, vous décidez ». Finalement il y en a un qui a levé la main avant les autres. Ça a été lui trois soirs de suite, et après je le lui ai reproché. Non, j’ai vraiment pas géré.
    *
    Décider avant la soirée n’était obligatoire, mais j’aurais dû, vers minuit, commencer à me poser la question. J’aurais dû décider et le faire savoir à chacun. Et j’aurais même eu le droit de choisir le même trois soirs de suite, en tous cas vu leur état d’esprit qui le permettait.

    *** Ce qui me permet d’avoir trois relations ***

    Soyons honnêtes, tout le monde ne peut pas avoir trois relations. Parfois même juste une, ça coince. Voici les facteurs qui me le permettent :
    *
    Je ne travaille pas . Et quand je travaillais, c’était pas très souvent.
    *
    Mon fils est assez grand pour se faire des pâtes. Pas besoin de courir à l’école tous les jours à quatre heures et demie.
    *
    C’est toujours mes -très nombreux- amis qui m’appellent et non l’inverse. Ils savent que ce n’est pas de la mauvaise volonté et je trouve quand même le temps de passer des bons moments avec eux.
    *
    Mes chéris n’habitent pas dans les mêmes villes. L’un est à 5mn de chez moi, un autre à Paris, et le troisième, parfois il passe me voir et parfois c’est moi qui le rejoins où il se trouve.
    *
    Ils ont tous d’autres relations et/ou occupations. L’un a une relation régulière et un travail pas trop prenant. Les deux autres ont juste de vagues flirts ou des ex qui refont surface, mais l’un a un boulot très accaparant et l’autre voyage et a des amis partout.
    *
    Dialogue, sincérité, réflexion, dialogue, bonne volonté, sincérité, dialogue, réflexion, bonne volonté, dialogue.

    • Intéressante analyse d’Epicène. Elle commence par « Exprimer ses envies et ses possibles » et c’est effectivement peut-être là que la différence se fait: il y a quantités de personnes qui vivent dans des environnements dans lesquels il n’est pas possible d’exprimer ses envies en matière de sexualité.

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  13. Premier commentaire pour moi sur ce blog qui guide mes réflexions depuis presque 1 an et le début de l’expérimentation du couple libre chez moi , après 15 ans de vie de coupe monogame exclusive qui allait de soi et une infidélité-tsunami qui remet tout en questions… précisons que l’infidélité est de mon fait et les graines du couple libre déjà semées en moi depuis longtemps, sans pour autant de désir de concrétisation, ni même de conscience de cette germination inconsciente …. Nous voilà donc avec une infidélité à gérer, un couple pas mort pour autant, et un désir d’ouvrir la cage pour moi… tout en l’ouvrant pour lui aussi .

    Ce qui nous a amené à une inscription gleeden chacun de son côté, et là je confirme, études sociologiques, biais ou pas , il est nettement plus facile pour une femme que pour un homme de PROVOQUER des rencontres . Pas de trouver nécessairement ce qu’on recherche, mais générer des RDV (les contacts se génèrent tellement seuls que s’en est effrayant ) ne pose aucun problème . Le ratio hommes/femmes sur gleeden y est pour beaucoup bien sûr, mais on y retrouve malheureusement les mêmes comportements stéréotypés que dans la vraie vie : les femmes qui veulent se faire courtiser, et les hommes qui doivent se battre pour attirer leurs faveurs… Experience vécue en live , à 2 sur le canapé connectés en même temps …

    Ma deuxième réflexion concernera plus le coeur du sujet de cet article , à savoir la gestion « logistique » des relations polymaoureuses ou apparentées … A mon sens même si l’argument se tient de dire que l’absence du foyer est une absence « brute « , peu importe le motif , qu’il soit professionnel, familial ou polyamoureux , dans les faits cette acceptation est difficile à acquérir . Tout dépend bien sûr du niveau de jalousie de chacun ( extrêmement faible chez moi, plus élevé chez lui ), mais pour nous force est de constater que l’acceptation de l’absence dépend de plein d’autres facteurs notamment celui de la concomitance de relations satisfaisantes ….Accepter que l’autre voie son amant(e) ou demande à passer du temps avec lui/elle quand on n’est pas soi-même dans une relation où l’on peut profiter de moments équivalents , et de fait se retrouver à avoir l’impression de faire la nounou des enfants ou d’être le célibataire de service, ce n’est pas évident et c’est la difficulté que nous rencontrons en ce moment …
    un exemple concret : chacun a un(e) amant(e) au printemps, on convient que dans l’été on s’accordera une escapade quand les enfants seront casés , escapade qui aura lieu les mêmes jours pour d’évidentes raisons (entre autres d’avoir aussi plus de temps à passer ensemble, et que l’un ne se retrouve pas tout seul à la maison puis on change )
    Patatras , rupture d’une des relations … eh bien pour le moment le concept de l’escapade est remis en question par une des 2 parties , pas en tant que telle mais en tant que non-existante pour l’un des 2, donc impossible pour l’autre .
    Noeud qui renvoie à de multiples autres aspects du couple libre, la gestion de la jalousie, le thème du second violon, le droit de veto …
    Audren il me tarde de lire votre avis éclairé sur cette thématique de la disymétrie des relations dans un couple libre … De la gestion des marées quand elles sont hautes pour l’un et basses pour l’autre …
    A moins que cet article ne m’ait échappé malgré un épluchage minutieux du site ? 😉

    J’ai lu dans un commentaire qu’une dame qui était entrée en couple libre il y a 40 ans avait mis 25 ans à y trouver un équilibre …. Je ne suis pas étonnée ….

    En tout cas encore merci et bravo pour ce travail , et j’adore aussi les dessins …

    • Le souci, dans cette idée qu’il faut que les deux soient à égalité pour que ça se passe bien, c’est que la rupture de l’un met fin aux projets d’escapade d’une tierce personne (l’amant) qui n’y est absolument pour rien dans la rupture qui a conduit à l’annulation de l’autre escapade.

      Mon expérience, c’est que la question de la dissymétrie ponctuelle s’apprend progressivement. La dissymétrie permanente est en revanche un poison contre lequel toutes les parties prenantes (y compris l’amant) doivent unir leurs efforts.

  14. oui, là réside la grande difficulté à mon sens, la gestion double des sensibilités et suceptibilités de chacun, le délicat équilibre entre la « priorisation » du couple officiel et les désirs extérieurs … sans se perdre soi-même dans ses désirs et priorités …
    Où placer le curseur de ce que l’on impose parce que pas possible à négocier, faut-il un renoncement à tout ce qui n’est pas strictement adoubé par l’autre, ce qui revient à être suspendu à un droit de veto permanent ?
    bien sûr que cela prend du temps et de la patience … ouvrir la porte de la cage est une chose, attendre en confiance à l’intérieur en est une autre …

  15. Déjà parler de couple dans mon concept polyamoureux c’est pas possible pour moi. J’ai le respect de ma liberté et de celle des autres. jamais je ne craque pour quelqu’un en couple qu’il soit « libre » ou pas; Je n’ai de preférence ni pour les uns ni pour les autres. 2 d’entre eux que je vois plus régulierement ne m’appartiennent pas plus que les autres. C’est juste qu’ils sont plus dispo professionnellement. Je me donne autant aux uns qu’aux autres, selon affinités de secteurs, je ne peux faire autrement que donner et prendre le plus possible…Quand je suis avec l’un je ne pense pas aux autres et vice versa quoi; Je choisis les uns comme les autres en fonction justement de cette harmonie de don et de prise entre nous. Et je ne forme jamais de couple ni avec les uns ni avec les autres. Je suis et je vis le meilleur comme le pire avec les uns et avec les autres, sans en vouloir ni à moi ni à personne de ne pas avancer au même rythme si c’est le cas. Et surtout surtout si je tombe éperduement amoureuse je fonce en disant « au revoir, à bientôt » à tous et conseille à mes amis si ça leur arrive d’en faire autant !

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