Comment ça se fait que dans un couple on est capable de se comporter si mal et se dire des choses qu’on ne dirait pas à un-e ami-e, et sur un ton qu’on oserait à peine employer avec un chien ? (bon et désolé pour le titre mais ça fait un quart d’heure que je trouve rien de mieux)
Il vous faut vraiment des exemples ?
- On contrôle
- On juge
- On critique
- On rabaisse
- On exige
- On se venge
- On soupçonne
- On prend les trucs de travers
- On monte des trucs en épingle et sur ses grands chevaux
Tu vas quand même pas porter ce truc !?
Attends laisse-moi faire, si c’est comme ça que tu t’y prends…
Tu veux sortir seule ce soir ? Mais pour quoi faire ?
Pourquoi tu achètes encore ces cochonneries ?
Tu cherches vraiment qu’à me faire chier aujourd’hui
Putain, mais c’est là qu’il fallait tourner !
Tu les as foutues où, mes bottines ?
Il y a la version chantage affectif, genre si tu m’aimais vraiment tu arrêterais de fréquenter untel et une-telle parce que tu sais bien que c’est des cons.
Il y a la version contre-attaque immédiate avec surenchère clouante de claquet (oh ! c’est bon là ! c’est pas comme si j’avais enfoncé tout l’arrière de la voiture !)
Il y a la version passive-agressive, genre je dis ça je dis rien, y compris en mode ‘petite pique taquine’ devant témoins à un dîner (mwallléé, ça vaa, j’déconnaaiis).
Il y a la version j’ai passé une journée de merde et en plus de ramener toute ma mauvaise humeur à la maison je me passe les nerfs sur toi comme si c’était aussi un peu ta faute.
Ma petite idée
Ça paraît l’évidence même : s’il y a une personne avec laquelle il faudrait être encore plus poli-e, attentionné-e, respectueu-x-se, qu’avec toutes les autres, c’est bien celle avec laquelle on partage sa vie. Elle mérite d’être traitée au moins avec autant d’égards qu’un-e meilleur-e ami-e. Et pourtant c’est l’inverse qui se produit, après quelques années de vie de couple.
J’ai l’impression que notre modèle du couple est l’espace idéal pour laisser s’épanouir nos tendances de pervers manipulateur. En effet, on dirait que les codes de politesse, de prévenance ou de simple respect qui prévalent dans nos autres relations humaines (et en particulier nos relations amicales) n’y ont plus cours. Style parce qu’on s’aime on doit accepter des comportements que si c’était un pote qui nous faisait ça, on répondrait « pardon ? ça va pas bien ? » et on prendrait la porte vite fait si l’autre ne nous faisait pas des excuses immédiates, spontanées et très plates.
Comme je l’avais écrit dans cet autre article, il y a un moment où un couple bascule insidieusement de la communication amoureuse au comportement familier, et on finit par se parler comme on parlait à nos parents ou à nos frères et sœurs quand on avait 14 ans.
C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair, une personne morale, et un foyer fiscal. (Genèse 2:24)
Car la cause du phénomène, à mon humble avis, c’est notre modèle fusionnel du couple. Celui où les deux ne font qu’un, quand on s’évertue à flouter les limites entre toi et moi : puisque justement on n’est plus censé être deux personnes mais une seule entité, je peux laisser de côté le respect que je dois à autrui (puisque tu n’es plus vraiment autrui).
Malheureusement, le sentiment amoureux des débuts est un très fort moteur de fusionnalité. Pour appliquer à la famille nucléaire une métaphore atomiste approximative, plus on pousse la fusion loin, plus le noyau devient lourd et radioactif.
Alors comment on fait ?
D’abord, la moindre des choses, c’est qu’on reste attentif à la façon dont on se parle, en imaginant comment on ferait avec un-e meilleur-e ami-e. Et ne pas laisser passer ce qu’on ne dirait pas à un ami, ni non plus ce qu’on ne tolérerait pas de la part d’un ami.
Et puis pour prendre les devants et attaquer le mal à la racine, tout ce qui va à contre-courant de la tendance fusionnelle d’appropriation mutuelle est bon à prendre, quitte à fabriquer de la distance et du manque un peu artificiellement, tant il est vrai que les amours (un peu) contrariées sont les plus belles et les plus durables (d’ailleurs, et tant que j’en suis à la physique métaphoricienne, c’est les étoiles les plus légères, où la gravité est la moins forte, qui s’épuisent le moins vite).
J’en ai déjà quelques exemples ici et là dans ces pages :
- Évidemment il y a le couple libre, mais c’est peut-être un peu radical, en tout cas, c’est pas par là que je commencerais forcément — mais c’est important de savoir envisager que la cage puisse rester entrouverte.
- Des espaces de liberté en marge du couple, voire des sorties à soi, sans comptes à rendre.
- Des espaces numériques inviolables
- Maison à part, chambre à part, lit à part ou simplement des semaines off
- Et dans tous les cas : couette à part. La couette double est une hérésie qui n’est utile que pour les câlins mais qui empêche de bien dormir le reste du temps (la preuve qu’on est bien deux personnes distinctes). Pour les câlins, un joli couvre-lit double fera l’affaire. Et en plus les couettes simples passent au lave-linge.
Oui, je me demande bien aussi.
Il m’arrive fréquemment dans une dispute à la con, pendant que je beugle avec beaucoup moins de classe qu’une vache (au moins elle, elle en a) de me demander pourquoi je suis si hors de moi, et qu’il n’y a le plus souvent aucunes raisons pour que je traite mon compagnon de cette manière, aucunes. Et inversement, je lui ai souvent lancé qu’il ne traiterait pas un inconnu avec autant de mépris (d’ailleurs je ne vois pas pourquoi il devrait être moins respecté que moi l’inconnu, mais bon…)
C’est important de se poser la question quand ça arrive, c’est important d’essayer de garder son calme et de savoir reconnaître ses tords comme de savoir expliquer lorsqu’on se sent incompris…bref parler et toujours se demander ce qui est vraiment essentiel.
Hello à tous, merci encore une fois Audren pour cet article
Une autre solution, un poil plus radicale mais sympa en fait … éviter le couple 😉 et tu verras que la couette commune effectivement n’est que trop peu propice au sommeil, mais tellement agréable de temps en temps … les corps peuvent se rapprocher, et puisque ce n’est pas le quotidien, c’est tellement bon !! pourquoi s’en priver, chacun y trouve son propre plaisir .. ?!
enfin en tous cas, après le couple libre, c’est une autre étape je crois, où je suis, une question de choix aussi ; ce n’est plus le couple, juste le plaisir de se retrouver, chacun pouvant aussi retrouver qqn d’autre avec (a priori) le même plaisir. Dans le fond, on ne fait sa vie que soi-même, avec aussi la capacité à entendre les conseils des autres, mais notre vie nous appartient quoiqu’il en soit … entendre sans subir, je crois que c’est la marque d’un être (ou d’une) libre et heureuse.
vivons heureux sans faire souffrir les autres 😉 !
pascal
C’est effectivement encore plus radical et forcément très efficace.
Entièrement, complètement d’accord avec ça, radical, c’est vrai, mais sa vie, on la construit avec soi même ou bien?
Ce qui n’empêche pas le partage de chambre/lit/couette de temps à autres…
Jean Simard a dit “Est-ce qu’à vivre ensemble, on n’en vient pas à ne plus cerner le merveilleux dans l’amour ? Pour garantir leur amour, peut-être deux amants ne devraient-ils jamais se marier – ni cohabiter, qui sait ?”
Porte nawak la couette simple (enfin, selon moi toujours).
Une grande couette double, perso, je trouve ça top 🙂
Sinon, tout le reste on devrait se le répéter tous les jours, 20 fois par jour s’il faut… moi la première.
Ça fait mal à lire… « Plus vraiment autrui » rejoint mon analyse, qui était « Peu importe ce que tu penses, je sais ce que tu penses vraiment. Mieux que toi ».
Enfin un point sur lequel je ne suis pas d’accord avec toi, je désespérais d’en trouver un un jour: la couette commune. Bien sur qu’il faut une couette commune, lorsque l’on dort ensemble. Sinon, comment sentir la peau de l’autre quand? Où plutôt, ce point est aussi un choix de couple (et il a peut-être même une importance insoupçonnée 😉 ).
Mazette ! Des couettes individuelles ! Et pourquoi pas des lits jumeaux non jointifs ?
Voilà effectivement un point de débat que je n’aurai pas soupçonné, et de quoi alimenter mes études sociologiques personnelles (publiées dans la revue scientifiques internationale « Café du Commerce »).
Personnellement, je ne dors jamais aussi bien avec mon homme que quand nous dormons dans des lits simples côte à côte. Avec un lit double, il y a le problème du matelas (je préfère dur, il préfère mou), il y a le problème de la couette (il est frileux, j’ai toujours trop chaud), il y a les problèmes de dos (à cause du matelas, je tombe au milieu et mon corps se crispe à garder une position), il y a les problèmes de place.
Idéalement, il faudrait des couettes détachables/rattachables et d’épaisseur réglable grâce à une télécommande. Idem pour les lits.
A mon avis, historiquement, le lit unique nous vient davantage d’une question de manque de place/de moyens que d’un besoin d’intimité. D’ailleurs dans les temps reculés, c’était toute la famille qui dormait dans le même lit.
Par contre on conviendra qu’un lit double convient mieux à l’accomplissement du devoir conjugal. D’ailleurs le lit simple est souvent associé à l’enfance, et à l’adolescence, on bouscule vers le lit double. Et on parle bien de « coucher avec quelqu’un ». Même si c’est un héritage culturel, je pense que le lit double a encore un sens symbolique
Sauf que dans toutes ces considérations, on part du principe qu’on baise là où on dort. C’est étonnant que personne ne remette en cause cette association. Il y a plein d’autres activités qu’on ne fait pas là où on dort, alors même qu’on pourrait (n’est-ce pas, chevalier Karadoc ?).
Effectivement, mais après avoir eu un rapport, on a sommeil, c’est naturel. Et au réveil, la nature nous prédispose à un rapport: le matin notre corps profite d’un pic de testostérone, qui se traduit par de l’excitation sexuelle.
Et puis manger dans son lit ça aussi c’est formidable. (Sur la couette et avec une serviette, pour enlever les miettes facilement)
Après manger aussi, on a sommeil. En lisant, en écoutant de la musique, en prenant un bon bain, en conduisant. Et pourtant, on évite de faire tout ça dans le lit 😉
Par ailleurs, après une activité sexuelle « on » n’a pas « naturellement » sommeil. C’est votre cas. Pour nombre d’entre nous, c’est une activité revigorante qui donne envie de se lever, bouger, ou recommencer.
Ah si, on lit et on écoute de la musique dans son lit (on parle bien de « libre de chevet »). Par contre conduire et se laver dedans ça me paraît contraint en effet.
Quitte à avoir un meuble de 160x195cm, autant rentabiliser cet espace et multiplier les actions qui s’ y tiennent
On parle bien de « coucher avec », plus rarement de « dormir avec » en tant qu’euphémisme pour le sexe. « On conviendra » aussi qu’on dort mieux seul. Que le sexe est plus intéressant quand il n’est pas « automatiquement » lié à l’activité sommeil qui va suivre, ou au « pic de testostérone » du réveil (source ?), qui signifierait que l’un des deux protagoniste est concerné et que l’autre doit… quoi, laisser faire ?
Dans mon cas la nature a simplifié les choses en me faisant aimer les hommes plus que les femmes.
Non je ne dis pas que le sexe doit forcément être lié au sommeil, au lit, à la chambre à coucher, juste que c’est agréable de se lever et de commencer sa journée comme ça. De même, le soir, après un rapport, enchaîner directement sur des câlins pour ensuite s’endormir ensemble, je trouve que ça apporte une certaine harmonie.
Le « laisser-faire » est un peu hors de question par contre. Si mon partenaire n’est pas prompt à avoir un rapport au réveil, je ne vais pas le contraindre, ni l’empresser. Le consentement et le respect mutuel vont de paire avec la sexualité.
(Pour en revenir au pic de testostérone, je n’ai plus l’article sous la main, mais une recherche google permettra aisément de le retrouver. Il y a d’autres situations qui génèrent cela: un léger manque de sommeil, une séance de sport…)
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Bonsoir à toutes et tous.
Une autre suggestion pour éviter le manque du respect de l’autre, c’est peut être d’être attentif a se respecter soi.
D’une part, c’est une lutte efficace contre le besoin de fusion (je suis bien avec moi même, j’ai donc mpins d’attentes de laitre), d’autre part une base de respect et d’amour des autres (je ne peux donner que ce que j’ai, de l’amour plutôt que de la dépendance).
Le travail sur l’amour que l’on est capable de se porter a soi même, l’attention sur les choses que l’on vit, que l’on pense, l’interrogation sur le « je » plutôt que sur le « tu » peut peut-être éviter d’entrer dans ces manquements que décris dans cet article.
Qu’en pensez vous ?