D’où vient ma jalousie ?

Ceci est l’article miroir de « Comment as-tu osé ?« . Une introspection semi-fictive sur le sentiment de jalousie, vécu de l’intérieur.

jalousie - une fille, deux garçons

D’où vient ma jalousie (ref. photo : Hetherz sur deviantart.com)

Comme la plupart des gens, apprendre ton infidélité me cause un intense bouleversement. Consciemment ou inconsciemment, je te tiens pour responsable de la douleur que je ressens.

Pourquoi une telle réaction alors que tu aurais tout aussi bien pu t’éclater en boîte avec tes ami(e)s, ou profiter d’un soin du corps chez l’esthéticienne, ou bien encore déguster des sushis avec ta soeur.

On peut y voir deux raisons, toutes deux archaïques. La première, c’est la sacralisation de l’acte sexuel. Grâce à la contraception, on peut pourtant maintenant le ranger parmi les autres plaisirs intenses de l’existence. Et au contraire de certains autres plaisirs, il est gratuit et plutôt bon pour la santé. Ainsi, ton aventure signifie simplement que tu a pris du plaisir sans moi. Si notre couple battait de l’aile et que tu étais en train peu à peu de t’éloigner, que tu passes tes soirées avec tes ami(e)s ou dans les bras d’un(e) autre n’y changerait pas grand-chose : la séparation serait au bout du chemin, infidélité ou pas, dès lors qu’on partage de moins en moins de chose, et surtout les plaisirs. Mais notre couple est solide, l’amour est là, personne ne veut partir, alors pas besoin d’en faire tout un plat : tu a pris du plaisir sans moi et c’est tant mieux pour toi.

La deuxième raison, c’est cette possessivité maladive héritée du patriarcat. Spontanément, je me mets à penser que si tu continues, il va falloir que je « partage » et que je n’ai pas envie de te « prêter » à quelqu’un d’autre. Te laisser partir au boulot neuf heures par jour, ou même te voir t’absenter une semaine en mission, ça ne me pose pourtant pas de problème. Mais te savoir ce soir avec quelqu’un d’autre ou t’imaginer en week-end romantique sans moi, ça me tue. Ca veut bien dire que ce qui m’embête, ce n’est pas de partager ton temps, mais bien de partager ton corps. Or ton corps n’est pas plus à moi que ton temps. Tu en fais bien ce que tu veux. Je voudrais me débarrasser de cette possessivité et t’aimer « pour toi » plutôt que te vouloir « pour moi ».

En y réfléchissant, je vois bien que c’est en moi que ça se passe. Et si j’ai mal, tu n’y es pas pour grand-chose (bon, tu aurais pu éviter de me mentir, ça aurait un peu limité les dégâts). Il faut que j’arrive à ressentir que rien ne me menace, que je t’aime et que tu m’aimes, et que ce n’est pas en t’enchaînant que je vais mieux te garder. Répète-moi que tu m’aimes, montre-moi que tu m’aimes. Si on arrive à faire en sorte que jamais plus je n’en doute, je crois bien que ma jalousie finira par s’évaporer.

28 réponses à “D’où vient ma jalousie ?

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  9. Pour moi la jalousie est un symptôme, le symptôme d’une insécurité affective, qu’on dissimule derrière une rationnalisation excessive, de la colère, de la violence parfois (souvent ?).
    Je suis jeune (22 ans), et ma tranche d’âge trouve de bon ton d’affirmer que « la jalousie est une preuve d’amour ». J’ai rarement lu une phrase qui me donne autant la nausée. Qui sommes-nous pour attacher l’autre, le lier, l’enfermer, nous l’approprier ?
    Dans mon parcours de vie, j’ai appris que l’autre est un miroir qui vient nous révéler ce sur quoi nous avons encore à progresser. Et si nous voyions la jalousie comme un signal d’alarme ? Un signal d’alarme qui dirait : ce que tu reproches à l’autre et qui te fais si mal (l’adultère dans ce cas précis), est-ce que ce n’est pas ce que tu te fais à toi-même ? L’autre, à travers son « incartade », ne vient-il pas nous montrer que nos repères, nos croyances, sont devenues obsolètes ? Ne vient-il pas nous montrer, par effet miroir, que nous nous abandonnons nous-mêmes ?
    Ce que je perçois chez l’autre et qui me dérange c’est ce que je porte en moi et que je ne veux pas voir. Peut-être que dans le cas d’un adultère, l’autre vient nous montrer qu’il est peut-être temps de s’engager sur une autre voie, de cheminer, et de se défaire des chaînes qui nous lient depuis trop longtemps.
    Ceci, plus cette phobie de l’échec de notre société, qui considère l’erreur comme quelque chose dont il faut avoir peur par dessus-tout, et vous avez un joli cocktail d’émotions, de croyances, de peurs, dont le symptôme est la jalousie.
    J’avais vu une fois un couple libre de 3 québécois qui exposaient leur vie quotidienne dans une émission française (présentée par une blonde entre 14 et 15h sur la 2), et ce qui m’avait frappé, c’était leur calme, leur sérénité. Ils respiraient le respect et l’amour, c’était très beau. Je vous laisse imaginer la réaction du public, dont on sentait bien l’indignation mêlée de curiosité quant à certains détails…
    Ce « détachement », je l’ai appris grâce aux animaux. Comment ne pas se rendre compte qu’aucun être vivant ne nous appartient, et que, quelle que soit la façon dont on l’enferme, il restera toujours une part de lui qui nous échappera ?
    Pour moi, l’importance réside dans la façon dont nous appréhendons l’événement, et pas dans l’événement en lui-même. On ne peut changer l’autre. Peut-être que l’autre, à travers sa « faute » (berk j’aime pas ce mot), nous offre-t-il l’occasion de faire un retour vers soi ?
    Bref, j’adore votre blog que je découvre à peine grâce à une amie. Et puis quel coup de crayon !

    • Effectivement, la proximité des animaux nous apprend probablement une forme d’altérité irréductible qui permet ensuite de mieux comprendre l’altérité de nos frères humains, et de les respecter justement dans leur altérité plutôt que de vouloir les faire nôtres. Une partie de la jalousie s’explique un peu comme un replay de l’exil d’Eden ou du détachement de la mère, quand il me faut accepter que l’autre n’est pas une partie de moi-même.

      Régalez-vous sur le blog, et moi aussi j’aime trop mes dessins 😉

    • Joli résumé Caroline, merci. J’aime aussi faire le parallèle avec mes animaux pour rationaliser… J’adore mon chat, ça me stress un peu qu’il sorte car je sais qu’il y a des risques en tout genre, mais je ne saurais le priver de ce droit malgré le fait que le garder sur mes genoux égoïstement me permettrait de rester dans ma zone de confort. Je le laisse donc gambader quand il en ressent le besoin car dans l’absolu ça ne me fait pas de mal et il doit vivre sa vie et profiter de sa liberté comme j’aime profiter de la mienne. Je suis toujours super contente quand il revient et lui aussi finalement 🙂

  10. Il y a un an, mon amoureux m’a menti pour flirter avec une autre. Ce n’était pas tant le flirt qui m’a gêné que le fait qu’il me mente ouvertement en pensant que je ne m’en apercevrais pas. (Et quand je me sens insécure, je deviens une véritable stalkeuse parano coupant et recoupant chacune de ses paroles et heures d’emploi du temps pour savoir quand me mentait-il. En somme, je deviens un véritable calvaire.)
    Sa première justification a été la peur de me voir faire une crise de jalousie, alors qu’il n’y avait pas eu d’antécédent. Aujourd’hui, il reconnait qu’il a « fauté ». Mais en lisant cet article, je me rends compte que nous ne sommes peut être pas d’accord sur la « faute » (mensonge pour moi, flirt pour lui), et que j’ai peut être inconsciemment laissé planer le doute sur la faute.
    Bref, merci pour cet article, je me rends compte qu’une discussion s’impose.
    (et merci pour l’ensemble de tes articles qui me donnent – à Sophie et moi – matière à réfléchir 🙂
    Louise

    (et pour une raison que je ne comprends pas, impossible de commenter avec l’email THC lié à wordpress 😦 )

    • Pour le truc du commentaire, je crois qu’il faut être loggé sur wordpress.com dès lors qu’on laisse une adresse mail associée à un compte wordpress.com. Cela dit, à part pour les notifications ou pour que je vous recontacte, c’est pas grave de laisser une adresse bidon.

  11. Audren,
    Merci pour cet article, de m’aider à comprendre, mettre des mots sur les pourquoi…. Moi aussi, comme tu as pu l’être, j’ai été poussé du haut de la falaise (par ma femme !!!!) et je suis tombé dans ce nouvel espace dont l’immensité fait peur tant il y a de chose à appréhender, à savoir, à maîtriser, à accepter.
    Passer d’un statut reconnu de couple exclusif à celui de couple libre me paraît difficile mais pas insurmontable.
    Je passe par des périodes de doutes, sur moi même, sur la condition de notre relation, sur le devenir de tous nos acquis…. Et relire ton blog, tes articles est source d’apaisement.
    Il n’est pas facile de tout assimiler ou de digérer dans un contexte nouveau, notamment au niveau affectif…
    Mais il est vrai que l’équilibre commence à venir…. Notamment quand de mon côté, une rencontre arrive.
    Cela est synonyme de découverte d’une autre personne que l’on doit séduire, découvrir et aussi accepter de se laisser séduire.
    Cela permet aussi d’annihiler les pensées sordides que l’on peut imaginer à longueur de temps sur sa compagne (je ne dirai pas moitié car cette expression revient sur la notion de propriété !!!)
    Relire cet article et notamment ce dernier paragraphe me remémore l’importance de la communication et des échanges… Même si le chemin est long je crois qu’il est important de se repositionner régulièrement.
    De se questionner sur l’évolution des relations qu’on entretien avec nos partenaires pour faire évoluer nous même les règles que l’on se fixe et les manières de reconstruire notre couple… Libre aujourd’hui.

    Bannir ses doutes, ses angoisses est difficile mais comprendre qu’elles en sont les origines permet de mieux les faire disparaitre.

    Les comparaisons animales sont intéressantes et riches… Nous sommes avant des animaux conditionnés par deux millénaires de conceptualisation du couple par les religions et les dérives societales.

    À moi et à nous d’accepter ce changement de le faire évoluer, pour arriver à un épanouissement individuel et de couple. Tout en tenant compte des choses déjà acquises et construites…

    J’espère pouvoir vaincre tous mes démons et nous permettre d’arriver à vivre librement.

    Cyril

    • « deux millénaires de conceptualisation du couple » : je crois qu’en fait on plaque un peu trop nos repères du moment sur un passé qui a connu de très grandes variations (dans le temps, l’espace, les strates sociales) sur la notion de couple. Mine de rien, les rois de France (et aussi un paquet d’hommes et de femmes de la noblesse) étaient souvent en couple libre, plus ou moins clandestinement. Nos prétendus millénaires datent du serrage de vis dévot du XIXe siècle…

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  15. Comment connaitre les origines profondes de sa propre jalousie ?
    Parfois, je souffre de la jalousie. Elle toune et tourne dans ma tête.
    Je sais rationaliser mais ça ne suffit pas. Comment faire en sorte qu’elle se fasse toute petite et qu’elle ne soit plus si importante ?

  16. Je trouve tout de même votre approche un peu réductrice. Par exemple: « ça n’est pas que tu partages ton temps qui me fait mal, mais ton corps ». Non, le temps aussi. Les yeux dans les yeux, les petits baisers, les rires « particuliers »… Ce que l’on aurait voulu pour nous… C’est ça qui fait mal.
    Certes, on partage son temps de bien d’autres manières… Le boulot, tout ça… Mais ce sont des raisons qui n’ont rien à voir avec un choix sentimental envers un être humain. Ce n’est tout simplement pas le même plan.
    Alors oui, savoir que notre partenaire nous a trompé nous dégoûte physiquement aussi. Je pense que c’est parce que le corps de l’autre, c’est lui. Tu as partagé ton sexe avec celui de quelqu’un d’autre, c’est ton intimité toute entière qui ne m’est plus réservé(e).
    Réduire la jalousie à un instinct patriarcal corporel est dommage. On dirait que vous versez à nouveau dans la fameuse dichotomie âme/corps. Le corps de l’autre, c’EST l’autre. Quand le corps de l’autre nous échappe, c’est son âme aussi.
    Alors, ne pas vouloir partager, c’est égoïste? Probablement. Mais est-ce blâmable? Quand on est jaloux, c’est qu’on ressent une réelle insécurité. C’est qu’on a peur de perdre l’autre. C’est que non, on ne croit pas que l’autre nous aime comme avant. C’est qu’on a peur de le voir disparaître. Au temps présent, oui, il nous raconte qu’il nous aime encore: mais qu’en sera-t-il demain, quand cet amant inconnu l’aura comblé(e) de toutes les manières possibles là où l’on y arrive plus?
    Il me semble que la jalousie va bien au-delà de ce que vous présentez dans ce billet… Et que votre approche, excessivement – et maladroitement, à mon avis – rationaliste, est également culpabilisante. Je vois d’ici des lecteurs se dire « ah, mais j’ai un problème alors », et non seulement de ressentir cette première souffrance, mais s’en vouloir de ne savoir l’effacer.
    Jusqu’ici, j’avais lu avec plaisir tous les billets de ce blog… Mais là, je trouve la démarche maladroite.

  17. Rôh, que tout ça me remue… c’est terrip’. Mon couple aujourd’hui ? Après avoir vécu une relations très très monogamish pendant quinze ans dans l’enfer de ma jalousie, je vis depuis quatre ans en couple avec un homme bi-sexuel avec qui j’ai pratiqué une forme de libertinage qui s’est apaisé car je suis tombée trop souvent malade (opération en urgence d’une hernie discale, cancer du col de l’utérus et cerise sur le gâteau : AVC) que pour ne pas comprendre que j’encaissais mal le coup quoi que j’en pensais. Candaulisme, triolisme ou plus, mais toujours sous la forme de « mélangisme », jamais d' »échangisme », avec homme, femme, travesti, transexuel, à l’ombre parfois de pratiques bdsm. Mais jamais lui loin de moi. Je ne l’aurais pas supporté. Cuckhold convaincu, mon compagnon me pousse à l’adultère …. Jamais je n’ai eu autant envie de me repaître d’un couple peinard « monogame », ne m’évadant plus que par fantasme, partagé. J’ai été attirée par d’autres hommes, j’ai passé le pas… but so what ? Ca déraille. L’autre ne comprend pas « A quoi tu joues? », « Ton mec le sait? » « Vous êtes malades », ok, ok, c’est bon « Laisse looser, man, de toutes façon, je n’ai plus envie de toi là, c’est bon », « Et quoi, je suis un jouet? » (j’en suis moi-même venue à me poser la question…). Aujourd’hui je ne comprends plus. Je suis très angoissé car j’ai perdu tous mes repères. La société liquide en manque de lien dans laquelle nous vivons me fiche un peu les boules, j’ai peur de m’y dissoudre. Vous parliez d’éducation plus haut ou ailleurs et en effet, tout est là : je vois déjà aujourd’hui comment ma fille intègre des codes qui la malmèneront plus tard. Et ça me rend triste. Triste. Triste. J’ai envie de cet absolu. Mais duquel. D’une chimère qui me dévore. Puisse en effet la société évoluer sur ces positions afin de permettre aux générations à venir de mieux s’accepter et d’accepter l’autre dans ses élans. Pour ma part, je crois malheureusement que je n’y parviendrai jamais sans en souffrir profondément.

  18. La possessivité ne me plaît guère non plus, en toute forme de relation d’ailleurs : connaissances, amitiés et surtout amours.
    Mais pour la ‘sacralisation’ de l’acte sexuel, je ne m’identifie pas avec ce paragraphe. En plus, ce mot a de multiples définitions et sens populaires : je le comprends (dis-le moi si j’ai tort, stp) ici comme la mise de l’acte sexuel sur un piédestal, à un niveau de valeur morale exceptionnelle…
    Bien sûr, je ne nie aucunement d’avoir bien partagé des plaisirs où l’acte n’a pas été ‘sacré’, où ces moments ont été vécu sincèrement mais en-dehors d’un amour profond.
    Dans mes quelques relations d’amour profond (difficile à définir aussi….), en monogamie ou en polyamour, nos expressions sexuelles ont bien souvent eu une nature ‘sacralisée’, magique, transcendante, donnant la sensation de vivre une union unique … donc tout à fait incomparable avec les joies de badminton, équitation, échecs, musique ou tant d’autres grands plaisirs. Incomparable en fond, pas simplement en degré.
    Je l’avoue, je ne suis plus tout à fait jeune, je suis plutôt ‘romantique’ et l’une de mes professions est celle de conteur ; je suis également athée encarté depuis mes dix ans et je suis passé par des études scientifiques – mais ce mélange de poésie et de logique m’amène à ressentir cette possibilité, que l’acte sexuel en relation amoureuse peut atteindre ces sommets, qui sont pour moi enviables.
    Merci pour tes pensées et écrits, Audren

  19. La sacralisation de l’acte sexuel? Je n’y crois pas. Elle n’existe plus ou n’a même jamais existé. L’expérience personnelle qui précède le couple et l’expérience partagée font évoluer les individus. Plus grand monde ne couche que pour enfanter et la bonne santé des businesses de sextoys en tout genre montre que qu’il n’y a pas grand chose de sacré.

    La possessivité patriarcale? Là encore, les commentaires laissés ici et là montrent bien que les femmes sont tout aussi possessives de leur hommes que l’inverse. Même si c’était la mode il y a 10 ans dans les magasines féminins de prescrire l’adultère à ses lectrices, ce dernier n’a vraiment rien de féministe.

    Le couple monogame n’est pas plus à proscrire que les échangistes, les candaulistes les polyamoureux et autres. La sexualité ne fait pas tout, et les Hommes étant ce qu’ils sont et le temps étant ce qu’il est, c’est rarement cela qui est fondamentalement le problème du couple. Il est en plutôt le miroir.

    Je pense que comme pour toutes choses, le maitre mot est la confiance. La souffrance vient aussi de la trahison. De la parole donnée et bafouée. Du temps perdu aussi et de l’injustice. Tout le monde est taraudé par le désir qu’il a pour d’autres. Si l’un s’en affranchit sans en avertir l’autre, alors il y a une injustice, d’inégalité. Pourquoi contiendrais-je mes envies ou chercheraient à les convertir en désir pour mon partenaire s’il n’en fait pas autant?

    Et puis l’acte sexuel n’est pas neutre. On ne peut le réduire a un massage entre copines ou un séance de paintball avec des potes. Il y a une intimité incroyable et unique. Un échange. De sueur, de muqueuses, de caresses…c’est aussi l’exclusivité de cette intimité, de ce moment d’amour primaire, primal, sans rimes et sans balcons, que les couples se promettent.

    Je me pose comme tout le monde des quantités de questions. Oui, nous ne mourrons plus à 60 ans et s’engager aujourd’hui fait plus peur que jamais. Oui, les occasions font plus le « larron » que jamais. Le milieu de travail est mixte, la pornographie est partout et l’excitation sexuelle – non consenties – via la publicité ou même certaines modes, est quotidienne.
    Et je n’ai pas de réponses. La jalousie est là. La souffrance est là. La colère. Elles sont légitimes. Elles ont un sens (ce n’est pas juste les normes qui nous font saigner, les sentiments ne sont pas juste que le résultat d’une construction socialisante). L’incertitude des réactions si on franchissait certains pas. La peur de tout perdre pour ne pas gagner grand chose. La place et rôle du fantasme versus l’expérience du réel. La beauté des principes et la profondeur d’un engagement. La conscience de la difficulté aussi. On ne peut nier que la notion d’effort n’est plus vraiment à la mode. Le plaisir doit être facile, immédiat, et égo-centré. Pourtant, pour le meilleur et pour le pire a un sens. Ce modèle polyamoureux n’est-elle pas juste une facilité de plus d’une génération d’égoistes? Un arrangement pour que deux personnes qui ne pensent qu’à leur propre plaisir ou leur propre « bonheur » (entre guillemets tellement cette notion est indéfinissable) se donnent l’impression de choisir à deux?

    Et qu’est-ce que ce fameux « projet commun »? Il est unique à chacun j’imagine. Si cela est rassurant d’exclure la sexualité exclusive de ce projet, parce que son partenaire est volage, pourquoi pas. Mais pourquoi s’arrêter là? Pourquoi ne pas se poser la question de la sacralisation de l’enfant? L’enfant n’a pas toujours été au centre du couple comme aujourd’hui, bien au contraire. Il n’y a rien d’éternel là-dedans. Ce projet commun pourrait donc exclure l’exclusivité de l’enfant commun. Plusieurs familles à la fois? Des enfants qui changent de mère ou de père? Le retour de la nourrice?

    Chacun trouve son équilibre comme il le souhaite – ou plutôt arrive à se faire croire qu’il a atteint l’équilibre comme il le souhaite. Mais pour moi, cette reflexion est bien plus profonde et complexe qu’une histoire de normes dont il faudrait s’affranchir.

    Voila. En espèrant avoir été coherent. 🙂

    Et merci pour le texte.

  20. Pingback: S’émanciper du modèle de la permission | les fesses de la crémière·

  21. Bonjour,
    J’aimerai des conseils :
    Marié depuis de nombreuses années (et 2 enfants), nous étions dans une relation basée sur le contrat de mariage classique (assistance, respect et fidélité.)
    Mme a eu un RDV galant, mais plus que cela, elle a doutée de nous, de notre couple. Je me suis rendus compte de ces mensonges et lui ai dit directement. Apres un certain nombre de discussions, moi qui n’était pas jaloux ressent maintenant ce sentiment. Je l’associe à sa trahison de notre contrat et je ne crois pour l’instant plus en sa fidélité à long terme. Je ne supporte clairement pas d’avoir de nouveau le rôle de cocu. Quant à elle, elle ne doute plus de notre couple, elle a eut trop peur de tout perdre.
    Nous avons beaucoup discuté, et nous avons évoqué le couple libre. Cela tuerai ma crainte qu’elle me trompe à nouveau puisque de facto ce ne serai plus tromper… J’arriverai à dissocier le sexe des sentiments. Evidemment, dans ce schéma, je reprendrai aussi ma liberté.
    Elle a évoqué une contractualisation de cette hypothèse, une sorte d’avenant en quelque sorte. Le projet du couple reste prioritaire sur tout, on évite les sentiments (en tout cas, on s’engage à arrêter si cela devient dangereux pour le couple) et quelques limitations d’actions, au moins pour démarrer. (Préservatif ; Elle refuse que je pratique le sexe oral ; je lui demande de ne pas avoir de rapports anal ; adaptation des emplois du temps aux contraintes du ménage et des enfants ; discrétion)
    Surprise de ma part, après une longue phase de réflexion (ou elle était toujours en contacts à distance avec son partenaire d’un soir) elle ne se décide pas.
    Je lui demande alors de : ou signer le nouveau contrat ou de revenir à notre contrat de base de manière stricte et de ne plus communiquer avec l’autre. Elle me dit ne pas pouvoir signer l’avenant car elle a envie d’aller ailleurs, mais ne supporterai pas qu’une autre me touche ! Voir cela la dégouterai. Elle est trop jalouse !
    Du coup, elle préfère revenir au contrat de base sachant que je suis maintenant jaloux et qu’elle ne bénéficiera plus de la même liberté qu’avant.
    Je suis conscient qu’elle ne m’appartient pas, mais pourquoi devrais je lui appartenir ? Je n’ai pas super envie d’aller voir ailleurs, mais évidemment je reste un homme curieux :-). Ne croyant plus vraiment à sa fidélité, je me sens maintenant pris au piège dans le rôle du mari modèle qui finira à nouveau cocu.
    Qu’en pensez-vous ?

  22. Pingback: Couple | Pearltrees·

  23. Je lis tout cela et une question me brûle les lèvres : Audren, avez-vous ressenti de la souffrance, l’envie de hurler , l’impression de perdre pied….en apprenant l’infidélité de la femme que vous aimez ? Oui je sais que la jalousie ce n’est pas super, que l’autre ne m’appartient pas…mais là on parle d’intimité, de peaux qui se touchent, de corps qui se mêlent, comment supporter cela ? En vous lisant on a l’impression que vous avez vite pris le dessus. Moi j’ai l’impression que cela me détruirait, que ma souffrance m’anéantirait. Ou alors vous êtes un surhomme !

    • Donc non, rien de tout ça. Et ça n’a rien à voir avec être un surhomme, je pense. Et peut-être davantage à voir avec un certain conditionnement. On ne s’amuse pas à visualiser la personne qu’on aime faisant ses besoins (sauf fantasmes particuliers mais probablement minoritaires) ; on ne se la figure pas ensanglantée et fripée juste sortant d’un vagin le jour où elle est née ; on ne fait pas une fixette sur ce qu’elle fait avec sa main droite quand on a le dos tourné ; et plus largement, on se pose rarement la question d’où a été la cuillère avec laquelle on déguste un fondant au chocolat au restaurant. Je pense qu’on a un peu tou.te.s été formé.e.s à voir dans les choses du sexe et de l’intimité partagée un niveau de signification symbolique qui s’apparente à certaines superstitions irrationnelles alors on tourne en rond dans une obsession stérile (indépendamment de la possessivité et de la peur de l’abandon). Et pour en revenir à mon cas, je savais que je m’étais mis en couple avec une fille qui faisait ce qu’elle voulait ; et qui me signifiait, en rentrant de chez son amant, que c’est encore avec moi qu’elle voulait vivre.. pour moi, la signification explicite et réelle de ce qu’elle me disait, de ce qu’elle me faisait comprendre et ressentir, était bien plus forte que la signification symbolique du reste.

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