Monogamie de fait contre monogamie de principe

On entend souvent les polyamoureux dire qu’ils n’ont personnellement rien contre ceux qui préfèrent vivent en couple exclusif, et j’ai plusieurs fois écrit « chacun son truc ». Derrière ma position politiquement convenable, il y a une nuance : je n’ai rien contre la monogamie « de fait » mais je conteste vivement la légitimité de la monogamie « de principe ».

La monogamie de fait

Ce que j’ai envie d’appeler la monogamie de fait, c’est quand je n’ai pas spécialement envie d’aller faire d’autres rencontres. Sans me forcer, et surtout sans qu’elle me le demande explicitement ou implicitement, je suis fidèle à ma belle parce que ça tombe comme ça. Ce n’est pas parce qu’on s’identifie comme polyamoureux-se qu’on est obligé-e d’avoir plusieurs amant-e-s ou de garder un profil OkCupid actif. On peut parfaitement être 100% libre et 100% fidèle, pour tout un tas de raisons :

  • c’est plus simple pour plein de choses et quand on traverse des phases de vie bien chargées (genre changements au boulot, bébé à faire grandir, maison à construire) c’est aussi bien de pas chercher à compliquer ;
  • on veut se prouver, surtout en début d’une histoire, qu’on est prêt-e à s’investir à fond dans la relation, et donc on préfère ne pas s’éparpiller ;
  • on est tellement impatient-e de continuer à découvrir l’autre qu’on n’a pas envie de rater la moindre occasion de se voir, et les autres rencontres passent naturellement à la trappe
  • etc.

Cette vie monogame de fait, je la comprends et je l’ai d’ailleurs récemment vécue pendant presque trois ans, alors que je m’identifiais déjà comme polyamoureux (enfin, pour être tout à fait exact, il y avait à la fois ma reine et ma chérie, mais j’ai très clairement ressenti que je n’avais pas envie d’autres personnes).

Ce n’est pas parce qu’on est polyamoureux-se qu’on est obligé-e d’avoir plusieurs amant-e-s

La monogamie de principe

La monogamie de principe, c’est celle qui cherche à restreindre la liberté des partenaires, soit sous la pression psychologique de l’un ou l’autre, soit via le carcan social et culturel qui nous entoure. C’est celle que j’ai vécue pendant 20 ans avec ma reine, avant qu’on devienne un couple libre. C’est celle où on croit que c’est une preuve d’amour que de promettre solennellement qu’on ne fera jamais —— (remplissez les blancs) avec quelqu’un d’autre.

Ma conviction, c’est que dans un couple, on n’a ni à demander ni à promettre l’exclusivité, pas plus sur les choses du sexe que sur le reste. On ne promet pas de ne jamais aller dîner avec quelqu’un d’autre ; on ne promet pas de ne jamais aller danser avec quelqu’un d’autre ; on ne promet pas de ne jamais aller bosser avec quelqu’un d’autre…

Et même quand on se sent un peu jaloux-se que l’autre vive des choses épanouissantes et intenses sans nous, on prend sur soi parce qu’on sait très bien qu’on ne s’appartient pas. De même qu’il serait parfaitement déplacé d’interdire ce baptème en parapente sous prétexte qu’elle va passer vingt minutes collée à l’instructeur en plein ciel et shootée à l’adrénaline, de même je trouve illégitime notre cadre culturel (dont je prétends qu’il est hérité du patriarcat) qui considère qu’on a le droit d’attendre de l’autre qu’il-elle restreigne son plaisir et l’usage qu’il-elle fait de son corps en notre absence. Le sexe n’est pas un truc mystique et sacré et de nature tellement différente qu’il justifierait que la vie du couple puisse légitimement nier le principe de libre disposition de soi qui est au coeur des droits humains.

Conclusion

Et donc quand on dit : « moi, je me sens plutôt monogame », ça peut vouloir dire deux choses :

  • « je ne me sens pas polyamoureux-se » (et donc j’ai naturellement plutôt tendance à ne pas ressentir l’envie de faire d’autres rencontres quand je suis déjà en couple) ; et ça, c’est parfaitement compréhensible et d’ailleurs je suis un peu comme ça ;
  • ou bien « je ne pourrais pas vivre en couple libre » (et donc je ne peux pas laisser sa liberté sexuelle à mon/ma partenaire, même en mon absence) ; et ça, c’est beaucoup plus problématique, puisqu’il s’agit de limiter la souveraineté de l’autre sur son corps.

49 réponses à “Monogamie de fait contre monogamie de principe

  1. Pingback: Monogamie de fait contre monogamie de principe | Myster Jo·

  2. Bonjour Audren,
    Si ton article n’est pas un poisson d’avril (vu la date), que penserais-tu si ta belle du moment avec qui tu as envie de rester monogame voyait d’autres hommes de son côté ? Cela serait-il susceptible de te donner envie toi aussi d’aller explorer ailleurs ?

    • Non, sauf si ma belle n’est plus disponible. C’est bien séparé dans ma tête, et le couple libre n’a pas (à mon avis) vocation à être égalitaire. il faut juste qu’il soit libre, et équitable.

      • L’égalité c’est quand on fait deux parts de gâteau égales exactement. L’équité c’est quand chacun y trouve son compte, sans avoir l’impression d’être lésé-e, en particulier quand celui qui a plus faim ou qui apprécie davantage ce gâteau peut en prendre davantage et l’autre prend la dernière orange en échange.
        En version couple libre, ça peut être que seul-e l’un-e des partenaires a d’autres amant-e-s parce que l’autre n’en ressent pas le besoin, et qu’à la place il-elle puisse avoir du temps pour autre chose, ou une attention particulière, ou que sais-je encore dont il-elle a besoin

  3. Audren, merci pour ce billet. Je souscris totalement à ta position. La monogamie de principe est une coercition mais une monogamie de fait peut être libre, si on lui applique de façon concrète des principes polyamoureux co-construits. En effet, le revers de la médaille du polyamour serait dans son combat légitime contre la monogamie de principe qu’il promeuve à son tour une « polygamie de principe », solutionnant tout, qui finirait elle aussi par réprimer au nom d’une pratique de vie idéologisée et déconnectée des besoins des personnes. Merci.

    • Ce qui est gênant dans l’affaire, c’est que bien que je n’aie jamais lu de polyamoureux prendre position pour un « polyamour de principe », c’est un procès d’intention qu’on nous intente quasi systématiquement. C’est le même réflexe qui fait croire aux réacs pour tous qu’en légalisant le mariage de personnes de même sexe on va finir par interdire le mariage entre personnes de sexe différent.

      • Audren, je pense qu’on peut nuancer ta réponse, sur ton blog aucun problème là dessus, d’ailleurs ton billet, le démontre. Il me semble avoir déjà aperçu ailleurs et pas qu’une fois, une forme de sacralisation de la polygamie. Il est d’ailleurs un peu dangereux à mon sens de considérer que seule la monogamie de principe existerait et que la polygamie serait un vaccin à toute forme d’attitude réactionnaire ou d’enfermement idéologique. La polygamie ne pourrait être donc que « de fait ». Cela serait un peu dire que si la monogamie n’est pas toujours stupide, car pouvant pour les plus progressistes être « de fait », elle demeurerait donc malgré tout inférieure à la polygamie exempte pour toujours de ce genre de travers. Les principes du polyamour sont avant tout faits pour la polygamie mais restent à mon sens des principes fertiles pour les monogames. Les plus grandes avancées du polyamour, et finalement leur caractère transgressif, sont la relation de pair à pair, la non possession, la réciprocité, le respect du cadre co-construit et renouvelable, la liberté à l’intérieur de ce cadre plus ou moins large, les pratiques n’étant que secondaires à partir où l’application de ces « principes » sont bien des « faits ».

  4.  » On peut parfaitement être 100% libre et 100% fidèle, pour tout un tas de raisons  »
    « 100% libre et 100% exclusif », s’il te plait (et je suis persuadée que c’était ton idée). Je suis complètement fidèle même quand je ne suis pas exclusive.

    • C’est exactement ce que vous dite est j’ai employé « fidélité » par défaut, dans son acception classique (que je compte réfuter explicitement bientôt), parce que je n’ai pas trouvé d’autre terme pertinent. Je préfère garder le terme « je suis exclusif » à quelqu’un qui réclame l’exclusivité plutôt qu’à quelqu’un qui la vit lui-même pour lui. Si vous avez mieux que « fidélité », je suis preneur.

      • Salut !
        J’ai déjà réfléchi à cette question-là (le terme à choisir), et pour ma part, j’aime bien distinguer loyal de fidèle, dans la mesure où loyal a une idée d’honnêteté, de franchise et d’attachement affectif sincère. Fidèle, c’est quand on s’en tient à une promesse ou un contrat fixé passé à un moment donné ; loyal, c’est quand on se comporte d’une façon qui correspond à nos valeurs et qu’on soutient l’autre. Mais c’est sans doute une préférence personnelle.

  5. Une petite remarque sur la monogamie de principe, promesse de fidélité et souveraineté sur le corps: vous dites que c’est un asservissement des femmes. Je ne suis pas d’accord. Dans notre système social, les femmes sont censées être naturellement monogames et les hommes sont censés chercher à tremper leur pénis dans tout ce qui ne s’enfuit pas assez vite.
    (Je ne dis pas qu’aucune femme n’a envie de mulitplier les partnaires, je décris juste le système de pensée dominant.)

    Par conséquent, dans ce système de pensée, ce sont les hommes qui sont à asservir, puisque les femmes seraient déjà « naturellement » monogames. Ce sont les hommes dont il faut contrôler les sorties du soir, dont il faut tenir les cordons de la bourse et dont il faut contrôler les ordinateurs pour qu’il n’aillent pas tout dépenser en porno.

    • C’est parce qu’elles sont sensées être naturellement monogames qu’elles sont encore plus durement réprimées quand elles sortent du droit chemin, puisque ça veut dire qu’elles ont fait le mal intentionnellement. J’ai écrit ça quelque part mais j’ai la flemme de chercher.

      • Je me suis sans doute mal fait comprendre. Je ne dis pas que la situation des femmes est meilleure que celle des hommes. Je sais qu’elles seront plus réprimées.

        La remarque que je faisais vient de l’observation suivante: notre société aurait tout aussi bien pu décider que les hommes « bien élevés » sont tout autant incapables de désirs animaux que les femmes. Je pense d’ailleurs que c’était plus ou moins l’idée à l’époque victorienne: hommes et femmes de basse condition étaient supposés avoir des désirs animaux, les classes supérieures en étaient exemptées par grace divine.

        Mais notre société, depuis une vingtaine d’années environ, a embrassé le mythe que les femmes sont des princesses et les hommes sont menés par leurs désirs. Les hommes sont donc à controler et les femmes non.

        Historiquement, les sociétés ont toujours prétendu que les peuples à réduire en esclavage étaient plus proche de l’animal que de l’humain. Les romains décrivaient les « barbares » ainsi. Plus près de nous, les planteurs de coton et de canne à sucre décrivaient les « nègres » comme des animaux lubriques. Aujourd’hui, ce sont les hommes que notre société décrit comme des animaux lubriques, le parallèle est troublant.

  6. Sauf que le patriarcat impose (la plupart du temps) que madame se coltine une bonne partie des plannings des uns et des autres (boulot, affaires domestiques, emmener les mômes ici ou là..) et qu’il reste ainsi bien peu de temps à même imaginer qu’on puisse avoir des plans B (ou Q). Les « choses épanouissantes » dont tu parles me font sourire.. bizarrement elles sont souvent dévolues aux hommes et bien souvent dans le cadre de leur taf « rémunérateur », loin du foyer, avec week-end à la clé.. bref, oui, mais dans une société vraiment égalitaire, ce qui n’est pas le cas, loin s’en faut.
    Sinon, j’aime pas le parapente, mais j’aime bien tes articles,
    A+

    • Oui, ça aussi il faut que ça change. D’ailleurs j’hésitais pour aujourd’hui avec un autre projet d’article (spoil spoil spoil) : la garde alternée avant le divorce, pour que les femmes aient enfin du temps pour elles.

  7. D’accord avec ton propos pour la « monogamie de fait ». En fait, ça peut facilement tourner pénible dans les cercles poly quand la question d’entrée devienne : « alors, tu as combien de partenaires ? ». Pour cette même raison, je me suis un peu désenchantée avec le mot polyamoureux (avec son accent sur « plusieurs ») et je cherche encore un petit mot pour « quelqu’un qui veut vivre des relations libres (pour n>=0) ».
    Par contre, je trouve trop facile ton propos sur la « monogamie de principe ». Tu le présentes comme une personne qui impose quelque chose à quelqu’un d’autre. Ça, d’accord, ne va pas: c’est une forme d’abus. Mais, selon mes recherches anthropologiques approfondis sur les monogames (y compris des décennies d’immersion interculturelle dans sa curieuse société), ce n’est pas comme ça que la plupart des gens s’aperçoivent. Ils trouvent que son idéal de relation est un d’exclusivité, et ils cherchent activement et ouvertement des gens qui pensent pareil. Incroyablement, les gens entrent dans ces relations de libre volonté. Quand cet idéal se casse (un qui n’arrive pas à maintenir l’exclusivité) c’est considéré une faute grave : à corriger, à ne pas répéter, à regretter. Pour les cohérentes entre eux, la « faute » est aussi grave si elle parte de son partenaire que d’eux-mêmes. C’est donc une question de contrôle mais aussi tant d’eux-mêmes que de l’autre. Or, ce qui se passe entre adultes consentantes n’est pas notre affaire. Si deux personnes veulent être dans des relations dans ces conditions, c’est son problème. En fait, la relation monogamique peut facilement se comprendre comme une relation « kinky », où les gens trouvent le contrôle, la jalousie, l’interdiction même de penser (!!) à des autres personnes, comme partie des règles que font la relation excitante et belle. Un “kink” que je trouve bizarre, mais pas plus que bizarre que des rélations sado-masochistes, et pas grave si n’est pas imposé aux autres (YKINMKBYKIOK: Your kink is not my kink, but your kink is okay).

    • Très pertinent.
      Mais je pense que les relations kinky n’exigent pas de l’autre qu’il reste dans le jeu 100% du temps. Je ne fréquente pas de personnes dans le monde bdsm ou fétichiste, mais de ce que j’en comprends, la personne soumise qui fait un break d’un soir dans la soumission ou la personne « furry » qui préfère faire l’amour une fois de temps en temps sans le pelage n’encourent pas l’ire de leur partenaire qui se lamente de n’avoir encore pas trouvé une « vraie » soumise ou un « vrai » furry, et que tout n’était qu’un mensonge, etc. Ni leur propre culpabilité d’ailleurs.

      C’est le côté « 100% » de la contrainte qui est vraiment dur, irréaliste et in fine devastateur pour tout le monde. Quelqu’un qui dit « je suis monogame à 99% » est considéré comme un beau salaud.

      • OK, la comparaison avec les kinky n’était peut-être pas la meilleure (même s’il me plait de penser que les mono sont en fait les plus grands pervers de tous, avec leur obsession permanente sur le sexe).
        Mais n’est-il paternaliste d’assumer que c’est « in fine dévastateur pour tout le monde » ? Je peux dire que ça sera dévastateur pour moi, mais de prophétiser la dévastation des autres, quand ils me disent que c’est son choix ? Il y a longtemps que j’ai arrêté d’essayer de convaincre mes amis monos (des gens intelligentes, sensibles, pragmatiques, généreux) qu’ils ont tort. Ils savent bien que l’idéal d’exclusivité est un idéal, et donc pas la réalité. Mais c’est son idéal, ils le trouvent beau. Le polyamour est aussi un idéal (de transparence, de communication, de partage, de liberté) que ne correspond pas nécessairement à la réalité des polys (comme d’ailleurs tu l’expliques bien dans certains de tes billets) ; mais moi je le trouve beau quand-même.
        J’ai arrêté d’essayer de « convertir/sauver » mes amis mono quand j’ai compris que j’arrivais seulement à les toucher avec des arguments pragmatiques (« on a tous des envies ; ça vaut pas la peine de terminer une relation à cause de ça »), mais ils ne voyaient pas de tout la beauté de mon idéal des relations libres. Il m’a fallu des années pour trouver des gens qui partagent cet idéal, mais j’ai quand même gardé les amis mono : j’ai appris à arrêter de leur juger, et eux à moi.
        (et voilà something completely different – me trouver à défendre l’idéal mono !)

      • Ce qui est dévastateur, c’est de mettre le couple à la merci de la moindre imperfection dans l’idéal d’exclusivité (il n’y a que le 100% d’acceptable).

        La meilleure manière de défendre l’idéal mono, c’est d’éviter qu’il s’auto-détruise quand il réussit à 99%. C’est tout le but de mon article Jusqu’à ce que la mort (ou une pipe) nous sépare. Evidemment que c’est beaucoup demander à des personnes attachées à l’idéal d’exclusivité que d’accepter l’idée d’amours plurielles et d’amants réguliers. Mais si on n’est même pas capable de passer l’éponge sur un accroc d’un soir sans imploser ou sans traîner le truc comme une plaie suppurante pour les prochaines décennies, c’est vraiment sacrifier l’idéal auquel on tient tant pour un idéal encore plus inatteignable.

      • Pas besoin de me convaincre : je suis parfaitement d’accord avec toi sur les risques que les gens prennent avec son attachement à l’exclusivité. Mais bon, c’est leur problème, non ? Pas besoin de « contester vivement la légitimité » de leurs relations.

        En fait, la raison pour laquelle j’insiste sur ce post c’est que je reconnais le type de propos que j’ai tenu pendant des années, et mes amis en avaient marre de m’entendre critiquer leurs choix et de prophétiser la fin de leurs relations. Je critiquais parce-que je me sentais attaquée avec « mes idées bizarres » et je passais au contre-attaque ; mais surtout parce-que que me sentais seule avec mon idéal, et je voulais convaincre des gens à « passer de mon côté ». Je suis devenue beaucoup plus cool avec la monogamie des autres quand j’ai finalement fait des nouveaux amis qui partagent mon idéal de relations libres. Et mes vieux amis sont devenus beaucoup plus intéressés par mes idées quand j’ai arrêté d’attaquer les siennes.

        Merci pour la discussion.

      • Je ne critique pas pour que les gens « passent de mon côté ». Je critique pour qu’ils laissent la paix à celles et ceux qui ne font pas comme eux. Je critique pour donner un peu d’air à celles et ceux qui se croyaient des monstres avant de comprendre que non seulement il n’y a pas qu’un seul modèle de relations, mais qu’en plus le modèle dominant est basé sur des archaïsmes.

        Mais tu as raison, j’ai un peu fait le tour de la critique, et je vais passer à autre chose — en particulier un peu moins de théorie et un peu plus de pratique.

      • Tes écrits donnent effectivement de l’air aux gens – j’ai lu sur les commentaires quelqu’un(e) qui disait que ton blog l’avait changée la vie, et j’y croix. Merci pour écrire.

    • Pour Plural : « je cherche encore un petit mot pour « quelqu’un qui veut vivre des relations libres ».
      Je propose le néologisme inventé par une amie ayant la même recherche. En associant l’idée de liberté, qui lui était chère, à celle d’ami et amant (= aimant), je lui avais proposé « aimants libres ». Elle avait finalement relié les deux notions en un seul terme : libraimant(e). La relation devenant la libraimance…

      Le terme évite l’écueil du « amoureux », qui est quand même restrictif, ainsi que la référence à la « fidélité » (exclusivité) ou au « mono » et « poly ».

      Voila voila…

      • Merci Pierre, j’aime beaucoup: aussi tant l’élément « libre » que la connexion entre « ami » et « amant ». Dommage que ça ne passe pas en Anglais (une langue clé de mes interactions sociales), mais je garde précieusement cette suggestion. Merci.

  8. Ça rejoint l’un de nos échanges… Et effectivement, l’on peut être polyamoureux et exclusif à un moment donné, parce que notre disponibilité (sans aucune connotation négative à ce mot, au contraire) est insuffisante pour plus d’un/d’une partenaire.

  9. Pour ma part, chaque fois que je retrouve mes copines (monogame par principe) et que la discussion part sur le sexe, tout de suite vient la question « Alors, tu as couché avec cb d’autres mecs ? ou de filles ? »
    J’ai beau dire que, même si je ne suis pas exclusive, ce n’est pas le but de ma vie, la discussion commence tjrs comme ça. Décidément, nous ne nous comprendrons jamais sur le sujet.

    • Dans un épisode récent du lovecast, Dan Savage relatait un échange avec une consoeur journaliste à propos du couple libre entre lui et son mec. La fille disait qu’elle ne pourrait jamais vivre autre chose que l’exclusivité, qu’elle avait besoin d’amour et d’engagement dans ses relations. Dan lui a demandé combien elle en avait eu, des relations monogames comme ça. Il y en avait suffisamment pour qu’elle se mette à les compter une par une sur ses doigts, quand Dan lui a répondu que lui, il était avec son mari depuis 20 ans. Le lien vers l’épisode 404 (minute 43)

      • Merci pour ce lien !! Malheureusement, je ne suis pas assez forte en anglais pour le comprendre…
        Mais, normalement, je pars à l’étranger l’an prochain, peut être qu’à mon retour je serai assez bonne en anglais pour comprendre Dan Savage. En tout cas, j’espère.. je garde ce lien de côté !

  10. Je ne ressens pas la dycotomie que tu décris. Je comprends les concepts, mais les choses ne me semblent pas marquées comme ça.
    J’ai toujours été exclusive dans mes relations, et j’ai du mal à m’imaginer autrement. Mais il m’est arrivé d’être « la maîtresse » sans que ma morale ne se flagelle (c’était à mon partenaire de gérer cela, au mieux avec sa partenaire, au pire seul).
    Je suis en couple depuis 15 ans, dont 10 sans avoir conscience qu’il existait d’autres hommes sur terre. Aujourd’hui, je suis amoureuse d’un autre , mais je ne l’assume pas publiquement (juste un jeu de petit poucet avec mon conjoint, mais il fait semblant de ne pas voir les caillous), et je ne me vois pas franchir le cap du platonique. Je me sens bien incapable de dire s’il s’agit d’un choix pleinement libre (à cause de ma disponibilité, de mon idéal) ou un relent de morale (je n’avais jamais eu à réfléchir au modèle social dominant, et il est vrai que je ne sais pas quelle serait la réaction de mon compagnon si je lui exposais tout cash).
    Et pour la réciprocité… je pense que mon compagnon est exclusif, je l’espère, même s’il est évident que je ne le quitterai pas au moindre écart. Et je ne sais pas du tout comment j’encaisserais la nouvelle. Peut-être que je ne serais pas capable d’accepter?
    Bref, un long message pour expliquer que les choses sont mouvantes et multiformes…

    • « je pense que mon compagnon est exclusif, je l’espère »

      Prenez votre compagnon : comme il est, comme vous vivez votre relation, comme il a toujours été avec vous. Le même, avec toutes ses qualités, toutes ses attentions, tous ses défauts et manquements. Et maintenant imaginez que ça fait plusieurs années qu’il a une amante ou un amant, qu’il se voient une fois de temps en temps, jamais dans une circonstance qui empiète sur votre vie de couple. Qu’ils ont leur bulle de plaisir et de bonheur, que ça lui donne ce petit plus de pêche et de sourire qui lui fait encore plus aimer la vie. Et que jamais depuis ces années ça n’a changé la personne qu’il est avec vous. Jamais ça n’a changé l’amour et l’attachement et l’attirance qu’il a pour vous. C’est vraiment toujours le même homme avec vous.

      Dans cette expérience de pensée (imaginaire, idéale) inspirée de l’expérience de Schrödinger et de son chat, pourquoi faudrait-il ouvrir le carton pour réellement « savoir » ? Pourquoi faudrait-il espérer qu’il ne couche avec personne d’autre puisque de toute façon vous aimez la vie de couple que vous avez ? C’est vraiment cette obsession de notre culture à vouloir savoir ce que l’autre fait de son sexe qui me pose toujours question.

      • Je ne veux pas savoir ce qu’il fait de son sexe, j’aimerai juste que le mien lui suffise… C’est irrationnel, probablement utopique, peut-être injuste, mais ça fait partie de moi, que ce soit inné ou acquis, une qualité ou un défaut…
        D’ailleurs, pourquoi croire que c’est une obsession, pourquoi croire que je cherche à réellement savoir?
        Je l’aime et je souhaite pleins de choses pour nous deux, dans pleins de domaines. Parfois mes voeux se réalisent, des fois cela demande de l’énergie, et puis des fois je laisse tomber sans même essayer parce que ce serait perdu d’avance.
        C’est pas ça aussi la construction d’un couple? La rencontre des aspirations de chacun et des compromis?

  11. Que dire Audren sinon que tes propos sont tellement vrais. Je sors d’une relation ou j’étais la crémière, le crémier quand sa chère et tendre a appris pour la seconde ses aventures lui a demandé de choisir et il a choisi de retourner dans la monogamie et de ne plus me parler alors que nous étions amis par ailleurs. Je respecte son choix mais pourquoi devoir exclure l’autre ?

  12. La difficulté avec la monogamie de fait, c’est qu’elle peut empoisonner le couple « de base » quand les partenaires acceptent la non exclusivité pour l’un ou les deux membres…
    Pour illustrer ce propos, j’ai vécu une relation suffisamment longue pour vivre le décrochage de libido de ma compagne. Situation qui me faisait souffrir beaucoup plus qu’elle. Il s’est trouvé que 3-4 mois après les débuts de cette situation, elle a commencé à éprouver de l’attirance pour un autre. Je l’ai donc encouragé à tenter le coup avec lui. On allait voir si cette libido en berne, venait de notre relation ou si c’était juste un passage à vide pour elle.
    Les lecteurs de ce blog (qui n’existait pas à l’époque) qui ont lu cet article (https://lesfessesdelacremiere.wordpress.com/2014/06/06/quand-le-desir-deserte-le-couple-une-etude-sur-la-chute-de-la-libido-feminine/), sauront ce qui s’est passé.
    Toujours est-il qu’entre nous, ça n’a pas vraiment redécollé. Et même au contraire, si au début de l’expérience l’espoir était de sauver notre couple, l’effet inverse était entrain de se produire. Un éloignement géographique à mis fin à cette seconde idille.
    Il a fallut du temps (4 mois environs), mais la libido de ma compagne est revenue lors d’un week-end à l’étranger et avec elle la flamme des premiers jours. Cependant, après ce week-end nous avons été éloignés durant une quarantaine de jours. Durant cette période, ma compagne a passé plusieurs jours avec cet ex(?)-amant. Et bien qu’il me semble qu’elle ne l’ait jamais revue depuis, lors de son retour sa libido était de nouveau à zéro. Ca a sonné le glas de notre relation.
    Je veux bien entendre que j’ai été naïf sur les projets sentimentaux de mon ex, mais je crois sincèrement qu’elle était amoureuse de moi à cette époque et projeté de poursuivre sa vie avec moi. Je pense qu’il y a d’autres choses qui se sont jouées et notamment le carcan social qui pousse à la monogamie et à l’exclusivité sexuelle (mon amie m’avait d’ailleurs bien fait comprendre qu’elle vivrait très mal que j’aille voir ailleurs). A partir de là, de manière sans doute inconsciente lorsqu’elle couchait avec un autre, au lieu de raviver sa libido au sein de notre couple, cela accentuait le phénomène et fragilisé notre relation.

  13. Un question quand même. L’ensemble du site tourne autour du même questionnement qui est l’objet de ce post et qui, en gros, concerne le succès du modèle monogame.

    Et alors: pourquoi? Pourquoi, si hommes et femmes ont l’un et l’autre autant de désir ou de besoin de variété; pourquoi, si le diktat monogame est intrinséquement producteur de déséquilibre dans les couples et de séparations; pourquoi, si le modèle monogame est-il la source d’assèchement du désir et finalement de divorce; pourquoi donc ce modèle a-t-il autant de succès? Pourquoi la majorité de la population le défend-il? Pourquoi a-t-il même tendance à gagner en virulence?

    • Le modèle monogame est autant défendu par les femmes que par les hommes. Peut-être même est-il encore plus défendu par les femmes que par les hommes. Autour de moi, ce sont les mères qui éduquent leurs filles à rêver « faire un beau mariage » et qui critiquent le divorce.

      • Justement Jacques, c’est un sujet que j’aurais aimé évoquer ici avec notre ami Audren. Que dire à nos enfants pour qu’ils soient ouverts d’esprit ? Avec mon mari, notre discours a été jusque-là, quand on évoquait le sujet, qu’un jour ils feraient des bébés avec la femme de leur vie (nous avons 2 garçons). Je m’aperçois maintenant que ce discours n’est certainement pas le bon. Mais que dire… Je m’interroge.

  14. Je ne suis pas, mais alors pas du tout d’accord avec vous sur cette partie,
    je cite « ou bien « je ne pourrais pas vivre en couple libre » (et donc je ne peux pas laisser sa liberté sexuelle à mon/ma partenaire, même en mon absence) ; et ça, c’est beaucoup plus problématique, puisqu’il s’agit de limiter la souveraineté de l’autre sur son corps. »

    Ou alors, c’est exprimer ses envies/possibilités/choix moraux/etc, (par exemple « je souhaite que tu n’ailles pas voir ailleurs si nous sommes ensemble »), et laisser à l’autre la possibilité de le faire… ou pas (et donc, « sans ce critère, je ne souhaite pas que nous soyons ensemble »).

    Après tout, vous le faites, sur d’autres critères. C’est simplement quelque chose que l’on a le droit de souhaiter comme condition au couple… mais libre à l’autre de refuser, ou maintenant ou plus tard ! (Et donc de ne rien créer ensemble/de partir et de créer un autre couple… où il serait possible d’avoir des relations sexuelles avec d’autres, par exemple).
    Et en cela ÉVIDEMMENT que chacun a la souveraineté sur son propre corps.
    Je pense qu’il vous arrive d’aller vite en besogne quand vous produisez des phrases pareilles.

    • On a le droit mais éthiquement ca craint d’exiger de qui que ce soit qu’il accepte d’abandonner sa souveraineté sur son corps, pour la SEULE raison (ou alors il faut m’en donner d’autres) que l’autre est jaloux. La jalousie n’est pas une question de « envies/possibilités/choix moraux/etc », c’est juste un sentiment néfaste pour tout le monde contre lequel il faudrait lutter avant tout. Pour moi c’est un choix et une condition qui n’est pas basé sur l’amour, le respect et le désir de bonheur individuel et conjugal mais sur la peur, la possessivité et les pulsions de l’ego. Donc, sur le principe, c’est pas défendable.

    • « Après tout, vous le faites, sur d’autres critères » — je ne suis pas si sûr. Il me faudrait des exemples de choses qu’on demande à l’autre de ne pas faire même quand on n’est pas là (et des choses je que ne pourrais pas deviner sans espionner).

      Par exemple, on peut effectivement dire qu’on ne veut pas que l’autre fume (parce que l’odeur on la sent) ; qu’on ne veut pas que l’autre se bourre la gueule (parce que les humeurs et le côté ingérable, on se les récupère) ; qu’on ne veut pas qu’il reste tard au boulot (parce que pendant ce temps là il n’est pas avec nous et en plus on se tape tout à la maison). Mais je ne vois pas vraiment d’exemples où on restreindrait de façon légitime la liberté du partenaire pour des choses qui n’ont aucun effet mesurable sur notre vie de notre côté.

      « tu peux aller au cinéma seule, mais pas pour voir des films Marvel »
      « tu peux sortir avec tes potes mais ne mange pas avec eux.. »

      J’ai beau me creuser la tête, les seuls exemples pas complètement risibles concernent tous le contrôle du corps et du sexe (tenue, flirt, etc.) Et ceux-là aussi devraient en réalité être considérés comme complètement risibles.

  15. Bonjour Audren,

    Félicitation pour ton blog, et notamment pour ce billet.
    Il m’es arrivé quelque chose d’un peu particulier à ce sujet récemment, et qui rend la distinction que tu fais moins évidente.
    J’étais en couple libre depuis plusieurs années quand nous nous sommes séparés avec mon ex. Très rapidement je suis tombé fou amoureux d’une fille qui a effacé (au moins temporairement) toutes mes envies d’aller voir ailleurs. Je lui ai quand même expliqué comment fonctionnait mon ancienne relation et quels étaient mes principes. Au début elle m’a dit « être la femme d’un seul homme », mais ne pas vouloir priver son partenaire de sa liberté s’il en a besoin. Puis peu de temps après elle est revenue là dessus, en disant qu’elle avait besoin que son partenaire ressente lui aussi une envie de monogamie « de fait », mais qu’elle ne voulait surtout pas qu’il ait a se forcer à ça, qu’il n’ait pas à se retenir.
    Comme c’était mon cas à ce moment là j’ai accepté, mais quand même un peu inquiet de l’évolution des choses à l’avenir, en me disant que de toute façon rien n’était gravé dans le marbre, comme je venais de le prouver en revenant a une relation monogame après avoir arboré fièrement mes principes de liberté.

    Donc, à ton avis, est-ce que la monogamie « de fait » peut s’assortir d’un engagement sans être dévoyée ?

    Emmanuel

    • Je me pose la même question depuis longtemps. Ma réponse est non. On peut s’engager à ne pas chercher activement ailleurs ; on peut s’engager à apporter une attention particulière à la relation ; on peut s’engager à être présent en cas d’infortune. Mais on ne peut pas s’engager à quelque chose d’aussi volatil que l’aveuglement amoureux. Et c’est même pas rendre service.

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